Le Colibri à gorge rubis

photo d'un Colibri à gorge rubis

Le Colibri à gorge rubis Archilochus colubris est l'espèce la plus commune et la plus répandue de la famille des colibris au Canada. Il émerveille non seulement par sa petitesse, mais également par son adresse au vol, ses migrations et ses habitudes. Cet oiseau, souvent appelé, non sans raison, oiseau-mouche, forme une classe à part dans la faune ailée.

Caractéristiques physiques

De l'extrémité du bec au bout de la queue, le Colibri à gorge rubis mesure entre 7,5 cm et un peu plus de 9 cm. De la même taille qu'un gros insecte, on le confond souvent, surtout à la tombée de la nuit, avec le sphinx du Nord, dont il a les dimensions, la forme et la façon de voler.

Le mâle a les parties supérieures d'un vert lustré aux reflets métalliques, les parties inférieures d'un blanc grisâtre et la queue fourchue. Il porte à la gorge un splendide jabot de soyeuses plumes rubis, qui, selon l'angle d'éclairage, peut paraître parfois orange, parfois noir comme jais. La femelle est semblable, mais sa gorge est blanc grisâtre. Sa queue est arrondie, et certaines plumes extérieures de la queue, qu'elle montre lorsqu'elle adopte certaines postures ou lorsqu'elle vole, sont tachetées de blanc. Le bec du Colibri à gorge rubis est long, droit et presque aussi effilé qu'une aiguille à repriser.

Répartition

Le Canada compte cinq espèces de colibris, mais seul le Colibri à gorge rubis est présent dans les régions de l'Est. Il habite la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick, l'Île-du-Prince-Édouard, le sud du Québec ainsi que l'Ontario jusque dans les environs du lac des Bois et du lac Nipigon, au nord. Vers l'ouest, l'aire de répartition du Colibri à gorge rubis couvre le sud du Manitoba, le centre de la Saskatchewan et le centre et le sud-est de l'Alberta.

carte montrant la répartition du Colibri à gorge rubis

Les oiseaux des autres espèces se retrouvent dans l'Ouest. L'espèce la plus commune est le Colibri roux Selasphorus rufus, qui niche en Colombie-Britannique, vers le nord jusque dans les îles de la Reine-Charlotte, vers le nord-ouest jusqu'à la frontière de l'Alaska et vers l'est jusque dans le sud-ouest de l'Alberta. Ce colibri s'aventure aussi, bien que rarement, jusqu'au sud-ouest du Yukon, au nord, et jusqu'au sud-ouest de la Saskatchewan, à l'est. Le mâle rouge cannelle a une tache vert lustré sur le sommet de la tête et un jabot écarlate, qui peut parfois paraître noir. La femelle a les parties supérieures vert bronzé, des zones brun rougeâtre sur les flancs et la queue, et parfois, une petite marque rouge et verte sur la gorge.

Le Colibri calliope Stellula calliope est le plus petit oiseau du Canada. Il niche à l'intérieur de la Colombie-Britannique et vers l'est jusque dans les montagnes du sud-ouest de l'Alberta. Il lui arrive de s'aventurer, mais rarement, jusque dans le sud-ouest de la Saskatchewan. Le mâle a les parties supérieures d'unvert lustré et un jabot strié, de couleur pourpre. La femelle a le haut du corps vert bronzé, des rayures sombres sur la gorge, et les flancs de couleur chamois.

Le Colibri à gorge noire Archilochus alexandri niche rarement dans l'intérieur des terres méridionales de la Colombie-Britannique. Il ressemble au Colibri à gorge rubis, sauf que le jabot du mâle est d'un violet foncé changeant au noir.

Le Colibri d'Anna Calypte anna est le plus grand des colibris observés au Canada. La tache rouge pourpre sur la gorge du mâle se prolonge vers les côtés du cou et vers la couronne de la tête. Le reste du corps est verdâtre. Il niche rarement sur la côte méridionale de la Colombie-Britannique.

Vol

Le trait le plus remarquable du colibri est sa façon de voler. Il se déplace à une vitesse incroyable, change rapidement de direction et disparaît, telle une minuscule flèche verte. Il est le seul oiseau à pouvoir faire du sur-place en battant des ailes. Lorsqu'elles sont en mouvement, ses ailes pointues semblent disparaître. Au moyen de films et de photos, on a pu établir qu'elles atteignent un rythme de 55 à 75 battements à la seconde.

Le mouvement rapide des ailes produit un bourdonnement distinct, qui augmente et décroît selon la vitesse des battements. Lorsque le rythme est très rapide, le bourdonnement se transforme en une haute note continue, semblable à celle que produisent les flèches ou les balles de fusil qui percent l'air.

Migration

Dans le passé, les gens ne pouvaient pas croire que cet oiseau aussi petit et fragile, pouvait parcourir des milliers de kilomètres pour se rendre à ses quartiers d'hiver. De là la légende selon laquelle ces oiseaux minuscules voyageaient, agrippés à de gros oiseaux comme les Bernaches du Canada.

Nous savons maintenant que les Colibris à gorge rubis descendent vers le sud à l'automne et qu'ils remontent au printemps. Des observateurs ont été témoins, particulièrement à l'automne, de vols spectaculaires de ces petits êtres, passant comme un éclair au-dessus de leur tête et ce, en de nombreux endroits, comme la pointe Pelée et Port Stanley sur le bord des Grands Lacs. Selon les données recueillies, les colibris traversent le golfe du Mexique (800 km), en direction et en provenance de leur aire d'hivernage située en Amérique centrale.

Les Colibris à gorge rubis quittent leurs sites de nidification nordiques au cours de la deuxième moitié du mois d'août et de la première semaine de septembre. Ce sont les mâles qui, les premiers, entreprennent la migration, suivis des femelles et des juvéniles. Ils reviennent dans le même ordre, pendant les deux dernières semaines de mai. Des oiseaux bagués ont permis d'établir qu'ils retournent exactement au même endroit le printemps suivant.

Comportement

À son retour au printemps, le mâle délimite un territoire où se trouvent plusieurs sources d'alimentation. Cependant, comme ces sources sont d'une grande importance, il peut être amené à partager avec d'autres mâles et femelles le même secteur.

Les colibris, tant mâles que femelles, défendent agressivement leurs réserves alimentaires et les environs contre les intrus. Ces affrontements mènent à des poursuites vives et persistantes, qui se terminent parfois par des combats. Le petit oiseau se sert de sa vitesse et du bourdonnement de ses ailes pour intimider ses adversaires. Il recourt à certains types de vol pour manifester son agressivité. Par exemple, l'oiseau part d'un élan rapide et décrit un arc horizontal en U autour de la tête de l'intrus. Ou encore, il se balance de haut en bas comme un pendule. Ces deux types de vol s'accompagnent de notes aiguës, et le bourdonnement des ailes imite celui d'un gros bourdon en colère. Le colibri persiste dans son attaque et continue d'ennuyer l'intrus jusqu'à ce que ce dernier s'enfuie.

Un trait caractéristique de la cour du mâle est la fameuse parade aérienne du pendule, qui imite le mouvement d'oscillation fait autour des intrus, mais d'une façon plus élaborée. Le mâle plonge vers la femelle au repos ou en train de se nourrir, la dépasse puis remonte jusqu'à une hauteur de 2 à 3 m dans les airs et refait la même trajectoire en sens inverse. Il répète maintes et maintes fois ce mouvement de balancier, tout en émettant des sons aigus. Chaque fois qu'il s'approche de la femelle dans son mouvement de plongée, il augmente de vitesse et intensifie le bourdonnement de ses ailes. Puis soudain, la parade cesse, et le couple part en flèche pour recommencer ailleurs le cérémonial.

Après l'accouplement, le mâle se désintéresse complètement de la vie familiale. Il part butiner de fleur en fleur, pour y recueillir du nectar, ou s'installe pendant des heures sur un perchoir bien choisi pour surveiller le passage de petits insectes.

Nidification

La femelle construit son nid sans aide, habituellement sur une branche d'arbuste ou d'arbre feuillu, entre environ 3 et 10 m du sol. Experte en construction, elle utilise, pour réaliser son petit chef-d'oeuvre, des toiles d'araignée et du duvet végétal, comme celui des chatons et des quenouilles. S'aidant de son bec, elle cimente les matériaux entre eux et fixe solidement la structure à la branche avec des fils de soie collants sécrétés par l'araignée. Elle ramasse de petits morceaux de lichens et les fixe à la surface extérieure du nid, lui donnant ainsi l'aspect d'un noeud de branche. Elle en moule l'intérieur avec son corps et, avec son bec, jette à l'extérieur tous les morceaux mal assujettis.

La femelle pond deux oeufs blancs, de la taille d'un gros pois. Protégée de la pluie et du soleil sous un abri de feuilles vertes où elle a installé son nid, elle effectue de longues séances d'incubation. Ses absences pour s'alimenter sont de courte durée, et ses déplacements en direction ou en provenance du nid se font d'une manière prudente et furtive, suivant des parcours choisis.

L'éclosion se produit entre 11 et 14 jours après la ponte. Pas plus gros que des abeilles, les oisillons naissants sont presque nus. Leurs yeux sont fermés et leur bec est court. Après le cinquième jour, leurs yeux commencent à s'ouvrir et leurs plumes à pousser. Plus tard, les petits seront capables de pousser des pépiements prolongés. La femelle les couve et les nourrit au bec avec des aliments qu'elle régurgite de sa gorge. Elle débarrasse le nid des fientes en les apportant au loin; on a vu une femelle garnir la branche du nid d'une rangée bien droite de ces fientes.

Les oisillons quittent le nid après une période de 14 à 28 jours, mais ils continuent, pendant encore plusieurs semaines, d'être nourris par la femelle. Elle leur passe dorénavant les aliments de bec à bec, au cours d'un extraordinaire spectacle de poursuites et de vols sur place, en se penchant au-dessus de la bouche des petits, le temps d'y faire gicler le nectar que contient son bec.

Durant cette période, les oisillons ressemblent à la femelle, sauf que la gorge des petits mâles est marquée de rayures sombres et, parfois, de rouge. Au printemps, avant d'émigrer vers le nord, les adultes et les juvéniles muent complètement, ces derniers revêtant leur plumage d'adulte.

Nourriture et habitudes alimentaires

Les principaux aliments du Colibri à gorge rubis sont les petits insectes et le nectar des fleurs. Il attrape les insectes au vol, en partant de son perchoir d'observation, ou bien les trouve à l'intérieur ou près des fleurs. Pour laper le suc mielleux, l'oiseau insère profondément sa longue langue extensible et cylindrique dans la corolle des fleurs. Il préfère les fleurs tubulaires, comme les monardes et les ancolies. Lorsqu'il butine sur des fleurs dont la corolle est profonde, comme le lis tigré, il perce le calice de son bec et en extrait la goutte de nectar.

Les fleurs aux couleurs vives et contrastantes attirent particulièrement les colibris. Leur préférence va aux fleurs rouges, puis aux orangées, qui se découpent sur un fond ombragé; ils ne visitent les fleurs vertes que si le feuillage environnant est d'une autre couleur. Tout comme l'abeille, le colibri contribue à la pollinisation croisée : il transporte d'une fleur à l'autre d'une même essence le pollen auquel son corps s'est frotté.

La sève libérée par les trous que les Pics maculés percent dans les arbres est aussi une importante source de nourriture. C'est pourquoi on le voit souvent bourdonner autour d'un Pic maculé, espérant se faire conduire à une nouvelle source d'alimentation.

Les colibris se laissent facilement attirer aux mangeoires par une solution composée d'une mesure de sucre et de quatre mesures d'eau, que l'on fait bouillir pour retarder la fermentation et que l'on doit remplacer au moins une fois par semaine.

Mais ils ne réagissent pas tous de la même façon : certains s'habituent immédiatement à la mangeoire tandis que d'autres associent difficilement l'étrange dispositif à la boisson sucrée; dans ce cas, il est utile de marquer la nouvelle mangeoire de peinture rouge ou orange. Mais une fois qu'il a trouvé la mangeoire, l'oiseau ne tient plus compte de sa forme ni de sa couleur, pourvu qu'elle reste suspendue au même endroit. Lorsqu'il revient au printemps, le colibri essaie toujours de retrouver la mangeoire où il se nourrissait huit mois auparavant.

Le colibri a aussi besoin de boire de l'eau. Lorsqu'il survole une nappe d'eau, il lui arrive de descendre à la façon d'une hirondelle et de s'y abreuver en touchant la surface de son bec, laissant derrière lui des ronds dans l'eau.

Obstacles

Le mauvais temps, comme une tempête ou une gelée hors-saison, met particulièrement en danger la vie du colibri. Du fait de sa ressemblance avec les insectes, il est également la proie des éperviers et des buses ainsi que d'autres prédateurs insectivores. On a même signalé le cas d'un colibri qui, survolant un étang, a été avalé par un poisson. Les accidents semblent aussi jouer un rôle important : les colibris se prennent parfois aux toiles d'araignée ou s'empêtrent de quelque autre façon, incapables de se dégager, ou encore, ils s'empalent sur une épine ou tout autre objet pointu.

Leurs principales ressources, grâce auxquelles ils ont pu se distinguer des autres oiseaux, sont leurs couleurs aux changements subtils, leur petite taille associée à leur vivacité ainsi que leur agilité et leur endurance au vol. Ils sont, de plus, très utiles du fait qu'ils accomplissent un rôle important dans la reproduction des fleurs.

Ouvrages à consulter

  • Delaunois, A. 1990. Les oiseaux de chez nous. 2 éd. rev. et corr. Les éditions Héritage inc. Saint-Lambert (Qué.).
  • Godfrey, W.E. 1989. Les oiseaux du Canada. Éd. rév. Éd. Broquet, en collab. avec le Musée national des sciences naturelles. La Prairie (Qué.).
  • Savage, C. 1985. Ces merveilleux oiseaux du Canada. Éd. La Presse. Montréal (Qué.). Pp. 125-127.

 

Publié en vertu de l'autorisation du ministre de l'Environnement
© Ministre des Approvisionnements et Services Canada, 1974, 1980, 1993
N° de catalogue CW69-4/43-1993F
ISBN 0-662-98183-9
Texte: L. de Kiriline Lawrence
Révisé par Judith Kennedy, en 1992

 

 

 

 

 

 

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