Jauges, gabarits et indicateurs

Les outils manuels 1957

PROCÉDÉS RAPIDES ET MÉTHODES DE REMPLACEMENT

On se sert de jauges (gauges ou gages) pour remplacer divers instruments mesureurs tels que les règles, compas d'épaisseur, micromètres, verniers, pieds à coulisse, etc.

Certaines jauges sont standardisées, mais d'autres peuvent être conçues, agencées et fabriquées pour un travail particulier. Vous pourriez même en faire une vous-même (ou la faire faire par un machiniste) si vous ne disposez pas d'une jauge commerciale standard.

La plupart des jauges sont utilisées pour les mesurases de contrôle (ou de vérification). Elles sont rarement munies d'une échelle vraiment lisible, de sorte qu'il faut «contrôler» les dimensions cherchées au moyen d'un micromètre, d'un pied à coulisse, ou de blocs à jauger.

Vous constaterez que les jauges sont de formes, de modèles et de dimensions très variés.

La jauge de foret, utilisée pour déterminer les dimensions des forets à queue cylindrique, est un excellent exemple de jauge spéciale. Les autres jauges, tel le calibre à lames, aussi appelé jauge d'épaisseur (feeler gauge) ont une multitude de destinations.

LE CALIBRE À LAMES

La plus vénérable bagnole fonctionnera mieux si les distances d'éclatement de ses bougies d'allumage sont espacées comme il faut. En l'occurrence, vous vous êtes peut-être servi d'une pièce de dix cents comme calibre à lames parce que vous ne disposiez pas d'un véritable calibre à lames, tel celui que fait voir la fig. 181.

Fig. 181.— Calibre à lames (cales ou jauges d'épaisseur).

Ce dernier, parfois appelé jauge ou cale d'épaisseur, ressemble à un canif qui aurait un grand nombre de lames. Toutes ces lames ont la même forme, mais chacune d'elles est meulée avec précision de façon à avoir une épaisseur bien définie (qui est étampée sur cette lame).

L'épaisseur de ces lames varie d'ordinaire de .0015" (environ la moitié de l'épaisseur d'un cheveu) à .025" (environ l'épaisseur de l'ongle de votre pouce). On peut donc, en choisissant des combinaisons de deux lames ou plus, mesurer n'importe quel espace ou écartement, jusqu'à concurrence de l'épaisseur totale de toutes les lames.

Notez que les plus minces de ces lames sont placées entre les plus épaisses, pour les empêcher de gauchir ou de «friser». Quand vous vous servirez d'une combinaison de lames minces, efforcez-vous toujours de les protéger par celles (de la combinaison) qui sont plus épaisses.

Essuyez les lames avec un linge propre avant de vous en servir; sinon, votre calibre ne mesurera pas exactement. Même la plus mince couche d'huile, de graisse, de saleté, entraînera une imprécision.

Le secret d'une vérification précise («contrôle») des espaces et écartements est votre propre habileté à percevoir (à sentir) la tension exercée sur la lame quand vous l'avancez et la creulez dans l'espace que vous êtes en train de mesurer. Le meilleur moyen de développer ce «sixième sens» consiste à pratiquer le mesurage de jeux ou tolérances dont vous connaissez déjà les dimensions.

Les goniomètres et les jauges (ou calibres) de rayons (angle gauges) ont, eux aussi, des lames, mais, en l'espèce, c'est le contour de la lame, et non plus son épaisseur, qui est important. Toutes les lames d'un goniomètre ont la même épaisseur, mais chacune d'elles se termine par un angle différent. On emploie des jauges lorsqu'il faut fréquemment mesurer les mêmes angles.

Fig. 182.— Goniomètre, ou jauges d'angles.

Elles remplacent la sauterelle (ou fausse équerre, ou rapporteur d'angles) et sont indispensables pour mesurer des angles dans des endroits étroits où il serait impossible de se servir d'un rapporteur ordinaire.

Le calibre de rayons (radius gauge) a, lui aussi, deux jeux de lames. Le coin arrondi de chacune d'elles est l'arc d'un cercle. Le rayon de cet arc est étampé sur la lame.

Examinez une de ces lames — vous verrez qu'on peut s'en servir pour vérifier les rayons extérieurs tout comme les rayons intérieurs. L'emploi de ces jauges et calibres est essentiel pour les machinistes, modeleurs et fabricants de gabarits.

Fig. 183.— Calibres de rayons.

LES PALMERS

CALIBRES DE FILS ET FEUILLES MÉTALLIQUES

La fig. 184 représente un palmer (ou calibre standard) de fils et de feuilles métalliques (tôles) (wire and sheet gauge).

Fig. 184.— Palmer, ou calibre de fils et de tôles.

On l'emploie pour jauger des sections transversales de fils, et l'épaisseur de feuilles métalliques. On pourrait prendre ces mesures à l'aide d'un micromètre ou d'un pied à coulisse, mais le palmer circulaire ordinaire est plus simple, plus commode et moins coûteux.

Il y a plusieurs espèces de palmers à fils et tôles. Celui que fait voir la gravure est le standard américain. On se sert aussi, parfois, des palmers Impérial ou Birmingham.

Avant d'employer un de ces calibres, ne manquez pas d'enlever les ébarbures de la feuille ou du fil que vous voulez mesurer. A noter que c'est la gorge et non l'ouverture circulaire du palmer qui donne la mesure exacte.

On se sert de bagues-jauges à tolérance (ring gauges) pour mesurer le diamètre d'organes usinés arrondis (arbres, tiges, tringles, chevilles, goupilles, axes, etc.). Elles sont soigneusement usinées et meulées aux dimensions voulues, et le calibre de chacune d'elles y est étampé.

Fig. 185.— Un jeu de bagues-jauges à tolérance.

Elles vont généralement par paire, Tune portant le mot anglais go, et l'autre les mots no go. Si la pièce que vous êtes en train de mesurer se prête aux dimensions spécifiées, la bague go s'ajustera sur elle; si la bague no go peut être montée sur cette pièce, c'est qu'elle est en deçà des dimensions requises.

On se sert de jauges-tampons (plug gauges), fig. 186, pour vérifier le diamètre de divers orifices.

Fig. 186.— Types de jauges-tampons.

Un modèle communément employé est une variété du type «bague-jauge à tolérance» (go — no go). Une extrémité est meulée au diamètre minimum permis pour le trou, et l'autre est le diamètre maximum permis. Essayez d'introduire les extrémités de cette jauge-tampon dans l'orifice que vous êtes en train de mesurer. L'extrémité go devrait y pénétrer.

Si l'extrémité no go peut y entrer, le trou est trop grand. Le diamètre d'une jauge-tampon est étampé près de la surface de mesurage.

La jauge-tampon conique (tapered plug gauge) est, comme son nom l'indique, un cône long et arrondi. Les diamètres peuvent y être indiqués, à intervalles. Vous aurez recours à une de ces jauge-tampons pour calculer si un trou est trop petit ou trop grand. On se sert de jauge-tampons coniques spéciales pour mesurer les trous coniques.

La jauge que fait voir la fig. 187 est surtout employée dans l'armée et la marine, pour s'assurer que le diamètre de l'âme d'un canon est assez grand — d'un bout à l'autre — pour le passage du projectile. Nous ne nous étendrons pas sur ce sujet.

Fig. 187.— Jauge d'alésage pour âme de canon.

CALIBRES À MÂCHOIRES

L'emploi du calibre à mâchoires (snap gauge) ressemble fort à celui des bagues-jauges à tolérance, mais on peut aussi s'en servir pour vérifier le diamètre extérieur d'arbres sur lesquels il est impossible (à cause de leur construction) d'employer une bague-jauge à tolérance.

Le calibre que fait voir la fig. 188-A est un calibre à mâchoires et une bague-jauge à tolérance, combinés.

Fig. 188.— A) Calibre à mâchoires et bague-jauge de tolérance combinés; B) Calibre à mâchoires réglable.

Les calibres à mâchoires réglables sont munis d'une touche qui peut être réglée à la dimension voulue au moyen d'un micromètre ou de blocs à jauger. Celui que représente la fig. 188-B a deux touches réglables — on règle l'une pour le diamètre minimum permis, et l'autre pour le diamètre maximum permis.

BLOCS DE JAUGEAGE

II n'est pas impossible que vous ayez l'occasion de vous servir d'un jeu de blocs de jaugeage (gauge blocks) ; à tout hasard, il est utile de savoir en quoi ils consistent. Ces blocs sont définitivement tout ce qu'il y a de plus précis. On s'en sert comme d'étalons de jaugeage ; autrement dit, on s'en sert pour vérifier, «contrôler», la précision des autres jauges.

Fig. 189.— Blocs (de jaugeage) Johansson, dits jo-blocs.

Ces blocs sont fabriqués en diverses épaisseurs standardisées. On en combine deux, ou plus, pour obtenir l'épaisseur voulue. Les meilleurs sont usinés et meulés avec un tel soin qu'ils sont précis jusqu'à concurrence de quelques millionièmes d'un pouce. Leur horizontalité est d'une telle perfection qu'un bloc placé sur l'autre y adhère comme s'il y était agglutiné.

On leur donne souvent le nom de «Jo-blocs» parce que la première personne qui en ait fabriqué de vraiment parfaits s'appelait Johansson. Le jeu complet comprend 81 blocs.

Ces jeux de blocs «surprécis» sont gardés dans des chambres climatisées, où l'air est sec et dépoussiéré. La température de ces pièces est maintenue à un niveau constant en vue de prévenir toute dilatation ou contraction des blocs, phénomènes qui en modifieraient les dimensions.

JAUGES DE SURFACE

On emploie la jauge de surface pour mesurer les hauteurs, ainsi que pour tracer des lignes sur les surfaces verticales. Le type le plus communément employé porte le nom de trusquin universel (surface jauge) (fig. 190); une plaque forme sa base, et il est muni d'un bras et d'une pointe à tracer, réglable à volonté.

Fig. 190.— Jauge de surface ou trusquin universel.

 Quand on ajuste un trusquin universel sur la branche (ou lame) d'une équerre à combinaison, comme le fait voir la fig. 190, l'équerre et la base du trusquin doivent toutes deux reposer sur une surface plane et lisse (de préférence, un marbre à tracer).

Vous aurez peut-être l'occasion de monter un indicateur à cadran (dial indicator) (fig. 191) sur le bras d'un trusquin universel et de vous servir de ce dispositif pour vérifier si un objet est parfaitement rond ou cylindrique — un arbre de machine, par exemple, ou un fût de colonne.

Fig. 191.— Indicateur à cadran.

Mettez le trusquin en position et faites tourner l'arbre — s'il est gauchi, si ses proportions ne sont pas justes et régulières, l'aiguille du cadran indiquera la déviation.

Un indicateur à cadran a un point de contact qui porte sur un arbre, ou une tige ou tringle, pour en vérifier la cylindricité (alignement). Le modèle communément employé (fig. 191) a un cadran gradué en millièmes de pouce — soit + (plus) soit — (moins).

On a souvent recours à cet indicateur pour vérifier l'alignement des arbres de machines. On se sert d'ordinaire de l'indicateur à cadran simple avec les accessoires et attaches que fait voir la fig. 192.

Fig. 192.— Indicateur à cadran, monté, et ses accessoires.

La base porte des rainures en T, dont une sert à fixer le montant principal. Ce poteau porte un crampon réglable, qui maintient le bras de l'indicateur dans la position voulue. Quand on utilise un indicateur à cadran, sa base doit être fermement fixée à un objet solide.

Quand vous travaillerez dans un grand atelier de montage ou de réparation, ou dans un laboratoire expérimental, vous y verrez et vous utiliserez des jauges à cadran de types très variés. Les unes seront aussi simples que celle que nous venons de décrire, mais d'autres seront plus précises encore, et affectées aux destinations les plus diverses. En bref, elles sont nécessaires à d'innombrables travaux.

INDICATEURS DE VITESSE

Quand vous voudrez savoir «le Tpm», c'est-à-dire, le nombre de tours par minute que fait un moteur électrique, un arbre, ou quelque autre pièce tournante, vous le saurez facilement en consultant un indicateur de vitesse (speed indicator) (fig. 193), aussi appelé compte-tours.

Fig. 193.— Indicateur de vitesse.

Cet instrument est muni d'un jeu de touches interchangeables, en caoutchouc, qui s'ajustent sur sa tige. On vous le vendra d'ordinaire avec des touches coniques, ou à bout plat ou à ventouse. Cette dernière touche qui, comme son nom l'indique, est en forme de coupe, convient surtout à l'extrémité plate d'un arbre. La touche conique est employée si l'extrémité de l'arbre est fraisée.

Quand on se sert d'un de ces indicateurs, un des facteurs à considérer est le facteur «temps». Servez-vous de votre bracelet-montre s'il s'y trouve une aiguille chronométrique, mais mieux vaut une montre à repos — ou
à arrêt — (stop watch).

Le tachymètre, qui ressemble à un compteur de vitesse d'automobile, est une variété de compte-tours qui indique constamment les tours (révolutions) d'un moteur par minute. Certains tachymètres enregistrent cette vitesse, ou régime, sur un graphique.

JAUGES POUR PETITS ORIFICES

Comment établit-on le diamètre d'un petit orifice ?

La méthode la plus fréquente consiste à trouver une mèche à fer qui s'y ajuste aussi étroitement que possible. Le diamètre du trou sera le même que celui de la mèche. C'est une fort bonne méthode ... si l'on peut dénicher la mèche qui convient, et si une mesure de précision n'est pas particulièrement importante.

La jauge de petits orifices (small hole gauge), du type à deux hémisphères (split-ball), a pour fonction de déterminer avec précision le diamètre de ces petits trous. D'ordinaire, un jeu complet en comprend quatre, ce qui suffit pour mesurer n'importe quel diamètre jusqu'à 1/2 pouce.

Pour vous en servir, vous n'aurez qu'à introduire l'extrémité sphérique dans le trou, et à dilater les deux hémisphères en tournant le manche. Quand l'ajustage sera précis, bloquez la jauge au moyen du barillet (bouton) qui est au bout du manche. Retirez la jauge du trou, et mesurez cet «ajustage» à l'aide d'un micromètre ou d'un vernier (pied à coulisse).

Fig. 194.— Jauge pour petits orifices.

ENTRETIEN DES JAUGES ET INDICATEURS

Tous les outils et instruments de précision doivent être maniés avec le plus grand soin, et placés dans des boîtes, étuis ou réceptacles spéciaux dès qu'on n'en a plus besoin. Les jauges et indicateurs exigent les mêmes précautions qu'on prodigue naturellement aux chronomètres, compas, boussoles ou lunettes d'approche.

Ces outils et instruments perdront vite leur précision si on les laisse rouiller ou s'ils sont gauchis, plies ou ébréchés. Ici comme ailleurs, qui veut voyager loin, ménage sa monture !

Vous devrez tenir votre appareillage de précision revêtu d'une mince couche d'huile propre, qui l'empêchera de rouiller, et dans des coffres ou boîtes où il ne pourra être endommagé.

On ne saurait être trop soigneux quand on se sert d'instruments de précision, de jauges et d'indicateurs. Même les laisser choir sur le sol serait inexcusable.

Ne vous servez jamais de toile d'émeri, de papier de verre (sablé), de paille de fer, laine d'acier ou tout autre abrasif pour nettoyer les pièces mobiles d'un outil ou instrument de précision. Ces pièces sont usinées et meulées jusqu'à concurrence de tolérances infinitésimales.

User la moindre partie de leur métal gâchera l'ajustage des pièces et diminuera leur précision.

Questionnaire

1. A quelles fins se sert-on de la plupart des jauges ?

2. De quel instrument se (sert-on pour mesurer la distance d'éclatement des bougies d'allumage ?

3. Qu'est-ce qu'un palmer de fils et tôles du standard américain ?

4. Quels mots sont étampés sur les jauges-tampons le plus communément employées ?

5. Les cales, blocs ou calibres Johansson sont-ils des instruments vraiment précis ?

 

 

 

 

 

 

 

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