Les Fondations
Charpente et Menuiserie (1950)
Avant de faire le plan des
fondations d'une maison il faut se rendre compte de la nature du sol sur lequel
on construit.
Il ne faut pas oublier les effets de la gelée et le profondeur
où elle se fait sentir; cette profondeur varie de 2 pieds et demi à 5 pieds,
selon la composition du sol.
Que de maisons, que de chalets d'été se dandinent après l'époque des froids rigoureux pour se raplomber tant bien que mal à l'approche des chaleurs !
Les poteaux ou pilotis qui supportent ces constructions doivent être enfouis à la profondeur requise en tenant compte de la nature du sol, puis entourés de sable et de gravier qui agissent moins sous l'effet de la gelée.
TRAVAUX DANS LES EXCAVATIONS
Si les fondations doivent être en pierre ou en béton, (ce qui est plutôt du domaine de la maçonnerie dont nous parlerons dans un autre livre) le travail du charpentier consiste à être sillonner les tranchées puis à faire les formes pour le béton s'il y a lieu.
Les étrésillons. Lorsque les tranchées sont creusées à une certaine profondeur on a recours aux étrésillons afin de retenir les parois et d'empêcher les éboulis qui pourraient causer des accidents trop souvent déplorables.
Les étrésillons sont des planches que l'on place à tous les 2 ou 3 pieds de hauteurs sur les parois latérales, vis-à-vis l'une de l'autre et réunies par des supports horizontaux, que l'on maintient en place au moyen de coins de bois. (Fig. 89).
Fig. 89.— Étrésillons servant à retenir les parois d'une tranchée.
S'il est nécessaire de placer deux rangs ou plus d'étrésillons on les. renforcit à l'aide d'une pièce posée en diagonale entre les extrémités opposées des supports et qui agit comme un étançon.
L'étançon est une pièce de gros bois que l'on appuie, dans une position légèrement oblique, contre la paroi d'un mur ou d'une charpente pour l'empêcher temporairement de pencher. (Fig. 90).
Fig. 90.— Étançons utilisés pour soutenir un mur ou une charpente.
L'étai est une pièce de bois d'un certain diamètre que l'on utilise d'ordinaire pour appuyer ou soutenir temporairement une bâtisse ou charpente.
Si l'étai se compose de pièces de bois, blocs ou bouts de madrier, ces pièces doivent être placées absolument de niveau et d'aplomb afin d'éviter tout déplacement; s'il se compose d'un seul poteau ou chandelle, il doit être absolument vertical si l'on ne veut pas s'exposer à des accidents. (Fig. 91).
Fig. 91.— Étais supportant temporairement une bâtisse.
Le chevalement est un étai formé par la réunion de grosses pièces de bois, poutres ou madiiers qui étayent un édifice ou bâtiment. (Fig. 92).
Fig. 92.—Chevalement.
BASES DES COLONNES ou PILIERS
On entend par base toute partie saillante qui se trouve en dessous d'un poteau, d'un étai, pilier ou mur, et dont l'utilité consiste à élargir leur surface de pression pour la répartir sur une plus grande étendue du sol ou du matériel sur lequel ils reposent. (Fig. 93).
Fig. 93.— Centre de pression et centre de résistance.
Le centre de gravité est le point où aboutit la pesanteur dans une pièce quelconque. Il est normalement situé sur le centre d'une pièce rectangulaire ou cylindrique.
Le centre de gravité de la charge d'un poteau, pilier ou mur, se rapportant sur une base, est appelé centre de pression. Cette pression doit être égale à la résistance ou réaction du matériel sur lequel il repose et que l'on appelle centre de résistance.
Pour qu'un poteau, colonne, pilier ou mur soit en équilibre, le centre de résistance doit être directement en dessous du centre de pression.
Lorsque le centre de pression est appliqué au centre de gravité de la surface de l'assise ou joint, l'unité de pression sera uniforme; dans ce cas l'intensité de la pression sera égale à la charge divisée par la longueur de la base en pouces.
Ainsi si l'on prend une base de 16 x 16 pouces sur laquelle reposera une charge de 16,000 lbs, la pression sera de 100 lbs par pouce linéaire: 16,000 / 16 = 100.
Il arrive assez fréquemment que le centre de pression ne coïncide pas avec le centre de gravité de la surface de base. Dans ce cas l'unité de pression aux différents points ne sera pas uniforme et il n'y aura plus d'équilibre. (Fig. 93).
Si la base est en pierre, elle prend le nom de socle, en bois le nom de semelle, en fer c'est une platine, en fonte, un sabot. (Fig. 94).
Fig. 94.— Socle, semelle.
Ce que nous avons dit pour les bases s'applique également aux pièces placées sur le sommet d'une colonne, poteau ou pilier.
Si la pièce est en pierre c'est un tailloir; en bois, un sabot, en fer une platine. Les mêmes dénominations s'appliquent aux pièces placées sous les extrémités des poutres reposant sur un mur. (Fig. 94b).
Fig. 94b.— a) sabot; b) platine.
L'ÉQUERRAGE
L'équerrage consiste à disposer une pièce de bois sur une autre suivant un certain angle. C'est l'ouverture de l'angle formé par deux plans d'une pièce de bois qui se touchent.
L'équerre sert à tracer des angles droits ou à tirer des perpendiculaires; ce qui est d'équerre est toujours à angle droit.
Dans l'érection des charpentes, des pans en bois ou cloisons, que nous décrirons plus loin, l'équerrage est essentiel; si nous voulons que ces derniers soient d'aplomb et d'équerre il est essentiel que la charpente des planchers soit absolument horizontale ou de niveau.
L'horizontale est une ligne
droite qui est absolument parallèle à la surface de l'eau; c'est une ligne qui
est au niveau.
La perpendiculaire est une ligne abaissée sur une droite
quelconque, c'est-à-dire qui vient la rejoindre pour former deux angles droits.
(Fig. 95).
Fig. 95.— Équerre servant à déterminer les angles des fondations.
Il ne faut pas confondre la ligne perpendiculaire avec la ligne verticale.
Une verticale est une perpendiculaire abaissée sur un plan horizontal et formant quatre angles droits sur deux lignes qui se coupent à sa base. La verticale se dirige toujours vers le centre de la terre et se confond avec le fil à plomb. (Fig. 96).
Fig. 96.— Fiches et fil à plomb pour déterminer les perpendiculaires.
L'aplomb est ni plus ni moins qu'une ligne parallèle à la verticale. Le fil à plomb est un morceau de métal suspendu à un fil et qui sert à mettre un ouvrage d'aplomb, à vérifier si une ligne est verticale. (Fig. 96).
Le niveau est l'état d'un plan horizontal; un plancher peut être bien droit et ne pas être de niveau.
Le niveau est un instrument qui sert à reconnaître si un plan est horizontal. Il sert aussi à déterminer les différentes hauteurs et quelquefois à vérifier si un ouvrage est d'aplomb, lorsqu'il est muni d'un tube à bulle d'air transversal. (Fig. 97).
Fig. 97.— Niveau de maçon, à bulle d'air.
II y a différentes sortes de niveaux: celui du maçon, du menuisier, du constructeur, de l'architecte, de l'ingénieur.
Le niveau du maçon qui est le plus simple de construction, consiste en un triangle dont deux côtés se prolongent pour former des points et qui ressemble à un A. La pièce du bas est munie d'un trait au centre, sur lequel doit s'appliquer un fil à plomb lorsque l'instrument est placé sur une pièce horizontale.
Le niveau à bulle d'air. C'est une règle en bois ou en métal de 12 à 24 pouces de longueur (et quelquefois de 36" pour les ouvrages en brique), sur le sommet de laquelle est placé, au centre, un tube en verre légèrement courbé.
Dans le tube en question se trouve un liquide incolore — ordinairement de l'alcool — dans lequel se meut une bulle d'air. Lorsque le niveau est horizontal, la bulle d'air s'arrête au centre, dont un trait marque l'endroit exact. Plusieurs niveaux sont munis d'un tube transversal pour permettre de vérifier les aplombs. (Fig. 98).
Fig. 98.— Niveau de charpentier.
Le niveau d'eau comprend deux tubes en verre qui communiquent entre eux par un conduit et qui sont fixés sur un pied. Ce peuvent être simplement deux tubes en verre réunis par un boyau en caoutchouc d'une certaine longueur. On utilise le niveau d'eau lorsqu'on veut vérifier le niveau à distance, dans différentes sections d'un bâtiment.
La ligne du charpentier ou du maçon est un cordeau qu'on utilise pour aligner et pour indiquer les démarcations de la bâtisse (Fig. 99), pour aligner les colombages d'une cloison ou placer horizontalement les solives d'un plancher.
Fig. 99.— Ligne du charpentier.
On s'en sert encore pour effectuer le tringlage des pans et des plafonds, comme nous le verrons plus loin. Il en sera de même pour les divers emplois de l'équerre que nous verrons aux chapitres des escaliers et des combles.
EMPLACEMENT ET DÉMARCATION
Cet exposé général des éléments de la construction serait incomplet s'il n'était question ici, très brièvement d'ailleurs, des éléments secondaires qui contribuent à son étude.
Les démarcations de l'emplacement de la bâtisse sont d'ordinaire données par l'architecte ou le surveillant des travaux.
Il est d'usage de faire poser par le menuisier des bornes et d'établir des points de repère pour le creusage des tranchées, puis de fixer les lignes exactes pour les murs de fondations.
Le procédé le plus simple est de déterminer la ligne de façade, puis les lignes latérales, et enfin celle de la façade postérieure.
Pour établir l'équerrage des lignes latérales avec celle de la façade on se sert d'une équerre formée de planches délignées que l'on fixe sur un piquet vertical à l'un des angles.
On établit cette équerre par le procédé du triangle rectangle en construisant ses côtés respectivement de 3 et 4 pieds, et la diagonale de 5 pieds, ou encore 6, 8 et 10 pieds, que l'on rapporte de longueur exacte sur l'équerre en planche.
Au moyen de contrefiches en bois on fixe l'équerre de niveau, sur le piquet vertical, puis on établit les lignes parallèles et transversales. À leur point de rencontre on suspend un fil à plomb qui détermine l'endroit exact que devront occuper les fondations dans les tranchées. (Fig. 95-96).
Deux piquets sont fichés en terre à 2 pieds de distance et reliés par une traverse sur laquelle on fixe les cordeaux ou lignes. (Fig. 96-99).
Charpente des formes pour le béton des murs de fondations
Les formes sont des moules en bois ayant les dimensions exactes des murs de fondations (du solage) ou piliers et dans lesquels on répand le béton.
Le béton est un agrégat formé de ciment, de sable et de pierre cassée. Cet agrégat est malaxé avec de l'eau jusqu'à ce qu'il ait atteint une certaine consistance. En faisant prise après le moulage, le béton devient comme de la pierre.
Le mélange se fait dans les proportions d'une partie de ciment Portland, deux parties de sable bien net de rivière et de pierre cassée — dont la grosseur peut varier de 3/4" à 1" ou 1 1/4" — avec juste la quantité d'eau nécessaire pour lui donner une certaine consistance et le rendre plastique.
Une fois préparé à la pelle ou au malaxeur le béton est aussitôt versé dans les formes.
D'ordinaire on ne fait pas de forme pour les empattements des fondations. Le fond de la tranchée étant coupé de largeur nécessaire, la surface du sol solide ou du roc étant nettoyée, on y verse une couche de béton dont la surface est nivelée pour recevoir la base des formes.
Après avoir vérifié les lignes des murs de fondation, on construit les formes en fixant des poteaux ou colombages de 2" x 3" ou 2" x 4", selon la hauteur des formes, à tous les 16 ou 24 pouces de distance de centre en centre. Ces colombages sont reliés au bas et au sommet par des planches horizontales pour les enligner. Plus haut est le mur de fondation, plus rapprochés sont les colombages.
Ceux-ci doivent en outre être placés vis-à-vis les uns des autres afin qu'on puisse les brocher, à l'intérieur, à tous les quatre pieds de distance et 2 pieds de hauteur pour empêcher les parois des formes de s'écarter l'une de l'autre. (Fig. 100).
Fig. 100.— Formes en bois destinées à recevoir le béton.
Des broches galvanisées de 1/8" sont passées à travers les planches des formes reliant deux colombages. Puis, après avoir inséré à quelques pouces au-dessus de la broche un séparateur —une pièce de bois coupée de la largeur exacte que devra avoir la fondation — on bande celle-ci en la tournant avec une tige de fer. (Fig. 101).
Fig. 101.— Les parois des formes sont bandées au moyen d'un fil de fer tordu.
Les formes doivent être faites en planches de bonne qualité, de 7-8" d'épaisseur, blanchies et embouvetées, ou encore délignées sur leurs petites faces afin d'empêcher le ciment délayé de couler, ce qui aurait pour effet de créer des vides parmi les pierres sur la surface du béton.
On évitera, pour cette raison, l'emploi du bois vert qui, en séchant à l'air ou au soleil, laisserait des fentes dans les formes. Le bois ayant des trous de nœuds ou du liber présente les mêmes inconvénients.
L'épinette est d'ordinaire le bois employé pour cet usage. Les formes qui servent à mouler les piliers et les poutres, de même que celles dont on se sert pour le coffrage du béton armé, sont faites de construction analogue, sauf qu'on y ajoute des étriers en bois qui sont fixés à l'extérieur pour empêcher les formes de s'écarter. (Fig. 102).
Fig. 102.— Coffrages destinés à couler le béton pour les poutres, etc. À noter que les parois sont assujetties par des étriers en bois ou en métal.
Démontage des formes. Les formes ne peuvent être enlevées que lorsque le béton a durci pendant au moins 48 heures. On ne peut déterminer le temps exact qu'il faut au béton pour durcir.
Bien des causes peuvent en retarder la prise et le durcissement, spécialement lorsque les conditions atmosphériques sont défavorables ou lorsque le béton a été mal malaxé, ou encore lorsque les proportions du mélange n'ont pas été observées. En général les formes des colonnes et poutres peuvent être enlevées lorsque le béton émet un son léger quand on le frappe avec un marteau.
RÉCAPITULATION
1 — Jusqu'à quelle profondeur la gelée peut-elle affecter les fondations ?
2 — Qu'est-ce qui distingue un «chevalement » d'un «étai » ?
3 — Qu'est-ce qu'un «socle»; une «platine»?
4 — A quoi sert le «fil à plomb»; la «ligne du charpentier » ?
5 — Dans quelle proportion doivent être mélangés la pierre, le sable, le ciment et l'eau pour former le béton ?