Les Exploits de Quick et Flupke

 

 

Tout au long des années trente, Hergé fit vivre parallèlement à Tintin deux garnements insupportables appelés Quick et Flupke. Après la guerre, une moitié seulement de ces gags se trouva mise en couleurs.

 

Une création éphémère.

 

C'est le 23 janvier 1930, soit un an seulement après le départ de Tintin pour le pays des Soviets, que deux gamins insolents, deux «ketjes» comme on les appelle en bruxellois, firent leur entrée dans les pages du Petit Vingtième.

 

Leurs exploits allaient s'y poursuivre, de manière quasi hebdomadaire jusqu'en 1935, puis de façon de plus en plus irrégulière jusqu'en 1940: six gags seulement en 1937, cinq en 1938, sept en 1939, un en 1940. Trois nouveaux épisodes, d'une planche chacun, parurent en couverture du Soir-Jeunesse pendant l'hiver 1940-41, puis Hergé cessa définitivement de créer de nouveaux gags.

 

«J'ai abandonné ces garnements-là parce qu'ils me donnaient beaucoup de soucis alors que Tintin me mobilisait de plus en plus, expliqua Hergé à Numa Sadoul.

 

Dans Le Petit Vingtième, il s'est fréquemment trouvé un gag de «Quick et Flupke» par semaine, en plus des deux planches de Tintin et en plus (durant des années) de « Jo et Zette» pour Cœurs vaillants] Alors, adieu Quick et Flupke!... Quick était le surnom d'un de mes amis. Pour Flupke, j'ai pris «Flup» - Philippe - et le « ke » flamand qui signifie « petit ». Flupke, c'est «petit Philippe» (Numa Sadoul,  Entretiens avec Hergé, Éditions Casterman, 1983, p. 70.). »

 

Les exploits des deux personnages continueront pourtant de paraître dans l'hebdomadaire Tintin pendant une dizaine d'années, mis en couleurs par les  collaborateurs  d'Hergé,  une moitié des histoires parues avant guerre se trouvant republiées sous cette forme.

 

Conditions de publication

 

En 1931 et 1932, les Éditions du Petit Vingtième avaient fait paraître deux recueils contenant une sélection de ces gags. Casterman en publia trois autres en 1934, après quoi l'édition en albums de Quick et Flupke fut abandonnée, sans doute faute d'avoir connu un succès suffisant.

 

A partir de 1949, les exploits de Quick et Flupke mis en couleurs pour Tintin se trouvèrent repris dans des albums de petit format. Onze volumes furent successivement publiés, contenant chacun quinze gags, sauf le dixième qui en comportait seize. Ce n'est donc que 166 histoires sur les 300 qui existent en totalité qui ont été éditées sous cette forme, plusieurs des plus savoureuses et des plus insolentes ayant, on ne sait trop pourquoi, été exclues par Hergé.

 

En 1978 paraissait chez Casterman le tome 2 des Archives Hergé, reprenant pour la première fois dans un livre les gags qui n'avaient jamais été mis en couleurs. Cet épais volume riche en surprise renouvela profondément la compréhension de la série.

 

Couvertures des recueils 1 et 4 des exploits de Quick et Flupke, le premier publié par les éditions du Petit Vingtième, le second par Casterman.

 

      

 

Cet aimable Monsieur Mops.

 

Il était naturel de joindre à ces premiers Quick et Flupke la courte série de gags intitulée Cet aimable Monsieur Mops. Huit planches seulement parurent dans un agenda du grand magasin «Les Galeries Anspach», vraisemblablement pendant l'hiver 1930-31, avant d'être totalement oubliées par tout le monde, y compris par leur auteur. Voici quelques années seulement, un collectionneur gantois retrouva la trace de cette série et permit qu'elle soit republiée.

 

Le personnage de Monsieur Mops, qui évoque par plus d'un trait Chariot, réapparut en 1931 dans certaines planches de Quick et Flupke. Plutôt qu'une création séparée, ces huit gags presque muets semblent donc bel et bien constituer une simple excursion dans une des rues du quartier où sévissent les deux garnements.

 

 

Une étonnante publicité pour Quick et Flupke publiée dans Le Petit Vingtième au début des années trente.

 

 

Série ironique et irrespectueuse, Les exploits de Quick et Flupke représentent le versant anarchisant de la création hergéenne. L'humour corrosif d'un bon nombre de ces gags semble servir d'antidote à ce que le reste du travail de l'auteur pourrait avoir de trop sage.

 

La face cachée d'Hergé

 

A quelque niveau que l'on se place, «Les exploits de Quick et Flupke» apparaissent comme une sorte de négatif (au sens photographique du ternie) des Aventures de Tintin. En lisant cette série, on a l'impression qu'Hergé y a disposé tous les éléments que ses autres albums n'étaient pas en mesure d'accueillir.

 

Contrairement aux Aventures de Tintin, ce ne sont pas des fresques ambitieuses que l'on découvre ici: ni rebondissements incessants ni suspense haletant, mais de simples gags qui se développent et se concluent en deux planches.

 

Pas question d'exotisme non plus à l'intérieur de cette série : ni exploration de pays lointains ni incursions en des lieux inconnus, mais l'évocation d'un univers presque familier, à la limite du quotidien. Chacune des historiettes se déroule dans un Bruxelles qui doit beaucoup à ce quartier populaire des MaroH.es dont était originaire la grand-mère de Georges Rémi.

 

Par delà ces différences d'ampleur et de contexte, c'est surtout un renversement de structure qui permet de distinguer les deux pôles de la création hergéenne.

 

Dans les Aventures de Tintin (et plus encore dans celles de Jo, Zette et Jocko), le désordre - c'est-à-dire l'élément inducteur de récit - est toujours le fait de la situation extérieure; les héros ne visent, quant à eux, qu'à remettre les choses en place. Rien d'étonnant donc à ce que cette remise en ordre se double, parfois, d'un conservatisme politique dont la forme laplus pure est offerte par Le Sceptre d'Ottokax.

 

Dans « Quick et Flupke », à l'inverse, les problèmes ont toujours pour cause les héros eux-mêmes, comme si ceux-ci n'avaient pour but que d'introduire autant de perturbations que possible dans un univers au départ stable.

 

Les deux gamins - les «ketjes» comme on les appelle en bruxellois - vont donc s'en prendre en priorité à ces représentants privilégiés de la loi que sont les parents, le maître d'école et surtout l'agent de police n° 15, leur cible favorite. Quoi de surprenant aussi à ce que cette mise en cause privée soit quelquefois prolongée par un anarchisme politique dont Hitler et Mussolini, représentants caricaturaux du discours adulte, sont fréquemment les victimes.

 

En fait, ce n'est que rarement de front que les garnements s'attaquent à tout cela : l'ordre imposé par les adultes leur semble si coercitif et si absurde que, même sans le vouloir et souvent avec la meilleure volonté du monde, Quick et Flupke ne cessent de s'y heurter et de provoquer de petites catastrophes. C'est d'ailleurs l'une des forces de la série - et le secret de la jubilation qu'elle provoque chez les petits - que de nous offrir un véritable point de vue enfantin sur le monde.

 

À travers cet ensemble de gags, on le sent bien, Hergé a pu vivre pleinement l'enfance endiablée qu'il n'avait pas vraiment connue. Quick et Flupke incarnent son fantasme d'enfant turbulent tout comme Tintin matérialise les rêveries de reporter aventurier de sa jeunesse.

 

Un jeu sur la bande dessinée

 

L'une des principales nouveautés de ces bandes réside dans les audaces formelles que l'auteur y introduit. Lui si soucieux, dans les premiers Tintin, d'élaborer une forme vraisemblable, efficace et pour ainsi dire transparente, voici qu'il passe son temps à exhiber ces codes qu'habituellement il ne cherche qu'à dissimuler.

 

Alors que Tintin repose par exemple sur une perception régulière de la page, il utilise ici les techniques les plus variées: certaines planches ne comportent pas de séparation entre les cases, d'autres essaient des mises en page audacieuses ou des intégrations inattendues du texte dans l'image; l'une même est censée avoir été dessinée par Flupke en personne.

 

Mais, surtout, Hergé se sert ludique-ment des codes et des conventions de la bande dessinée pour créer des gags d'un humour tout à fait spécifique. Il fait intervenir à l'intérieur de l'histoire les albums dont Quick et Flupke sont les héros, apparaît lui-même dans un grand nombre de planches (généralement d'ailleurs pour se faire prendre à partie par ses propres personnages, ces garnements décidément irrespectueux de tout y compris de leur créateur).

 

D'autres fois, les héros se cognent sur le bord de la case ou gomment les éléments du dessin qui les dérangent, le tout dans un esprit d'absolue liberté.

 

«Les exploits de Quick et Flupke» annoncent par bien des traits un comique de dérision qui ne se développera que beaucoup plus tard, à partir des années soixante. Et certains auteurs qui croiront alors s'insurger contre la bande dessinée de papa ne feront que répéter des effets qu'Hergé avait lui-même inventés.

 

On l'a expliqué dans le tome 2 de cette édition, « Les exploits de Quick et Flupke» furent créés par Hergé entre 1930 et 1940. Après le début de la guerre, l'auteur, de plus en plus mobilisé par les Aventures de Tintin, fut contraint d'abandonner ces redoutables garnements.

 

Le versant ludique incarné par cette série ne disparaît pas pour autant de l'univers hergéen. Tout se passe au contraire comme si la fantaisie de «Quick et Flupke» s'intégrait dès cette époque aux «Aventures de Tintin».

 

N'est-ce pas au moment même où il interrompt les activités des deux gamins des Marolles qu'apparaissent dans Tintin les personnages d'Haddock et de Tournesol, proches l'un et l'autre de l'enfance et tous deux inducteurs de désordre, le premier par son alcoolisme, le second par sa surdité et ses distractions?

 

Et lorsqu'Hergé développera en sept ou huit images un gag autour d'un élastique ou d'un morceau de sparadrap, il ne sera pas difficile de comprendre sa provenance.

 

Annonce parue en 1931 dans Le Petit Vingtième. Dès ses débuts, Hergé fit preuve d'un sens remarquable de l'auto-publicité.

 

 

 

L'un des «cellos» réalisés par Johan De Moor et le Studio Graphoui pour l'adaptation de Quick et Flupke en dessin animé.

 

 

Longtemps dans l'ombre du fait même de la notoriété de Tintin, cette attachante série connaît aujourd'hui un nouveau départ grâce à la télévision. Johan De Moor, l'artisan numéro un de ce grand projet, s'explique ici sur les modalités de cette reprise.

 

J'écrivais que, depuis 1940, aucun nouveau gag de Quick et Flupke n'avait été créé. Il semble que les choses soient en train de changer à cet égard, un important programme de dessins animés venant d'être mis en chantier. Sur les 260 petits films prévus, la moitié sera basée sur des scénarios originaux.

 

Parallèlement à ces créations audiovisuelles, les albums paraîtront dans une présentation renouvelée (cette édition intégrale des œuvres d'Hergé prenant donc sur ce point valeur de document d'archives).

 

Au moment où cette série, longtemps écrasée par la notoriété des Aventures de Tintin, s'apprête à connaître un nouveau succès, il m'a semblé intéressant d'interroger Johan De Moor, le principal responsable de ce projet

 

« Quick et Flupke m'avaient toujours semblé pouvoir se prêter à l'animation beaucoup plus facilement que Tintin, explique-t-il. La simplicité du décor et le côté très "cartoon" des personnages correspondent parfaitement aux exigences du dessin animé.

 

En reprenant la série, j'accentue d'ailleurs cet effet, puisque c'est le premier style d'Hergé, celui des gags en noir et blanc dessinés dans les années trente, que je cherche à prolonger. Le style graphique des mises en couleurs ultérieures, où les personnages sont beaucoup plus fouillés anatomiquement, me semble moins dans l'esprit de ces histoires fondées avant tout sur la fantaisie et l'humour. »

 

Benoît Peeters — Est-ce que ce qui permet aujourd'hui la reprise de cette série n'est pas aussi le temps qui s'est écoulé depuis sa création? Pendant longtemps les personnages ont paru un peu vieillots. Aujourd'hui, ils prennent une sorte de charme rétro...

 

Johan De Moor — Oui, certainement. Mais en même temps, je ne cherche pas sciemment à jouer sur cet aspect rétro. Ce qui m'intéresse, c'est que les objets, les voitures années trente, les trains ont une valeur immédiate de symboles. Un gosse d'aujourd'hui joue toujours avec une petite locomotive à vapeur même s'il n'en a jamais connu une seule.

 

Le monde de cette époque, tel qu'on peut le recréer graphiquement, me paraît constituer un cadre idéal pour des histoires comme celles-là. C'est déjà la ville mais une ville où un enfant peut se déplacer plus librement, où la rue peut paraître un terrain de jeu idéal.

 

B.P. — Qu'est-ce qui vous a le plus séduit dans l'univers de Quick et Flupke?

 

J.D.M. — Ce qui m'a le plus fasciné dans ces histoires, c'est leur aspect quasi surréaliste. Les personnages ont des   pouvoirs   absolument   fabuleux, tout à coup ils peuvent par exemple couvrir le ciel de lettres immenses. C'est un univers fantasmatique très complet où les rêves les plus fous peuvent se réaliser mais où la mort et les angoisses enfantines sont aussi très présentes.

 

Une histoire comme celle où Flupke n'en finit pas de guetter un lièvre devant son terrier, dont la dernière image nous le montre toujours en train d'attendre alors que des immeubles ont poussé de terre, qu'il a maintenant une barbe de vieillard au milieu de laquelle des araignées sont en train de tisser leur toile, est une histoire qui me paraît avoir une force de fascination incroyable pour un enfant. C'est cet aspect là que, de plus en plus, je voudrais développer dans les gags que je vais créer.

 

B.P. — Quel est le critère qui a permis de choisir les gags d'Hergé susceptibles d'être traités en animation ?

 

J.D.M. — Le découpage. Certains des gags contenaient trop d'informations pour un film de 45 secondes utiles. D'autres en contenaient beaucoup trop peu. Finalement, nous en avons sélectionné une centaine, dont cinquante se prêtent d'ailleurs à une variante : à partir du même morceau d'histoire, le récit évolue différemment pour conduire à une nouvelle chute.

 

B.P.  — Avez-vous privilégié l'aspect   purement visuel ou le dialogue a-t-il aussi sa place?

 

J.D.M. — Au début, nous avons essayé de faire des récits strictement muets. Cela ne passait pas du tout. Les entendre parler augmente énormément l'humour et permet aussi de bien différencier les deux personnages, n faut bien reconnaître, à cet égard, qu'à un moment donné Hergé lui-même les avait quelque peu mélangés: ils étaient devenus quasi interchangeables.

 

Pour ma part, j'ai tenté de bien donner à chacun d'eux sa propre personnalité. J'ai donc accentué le côté hautain de Quick, pour en faire un enfant raisonneur, sûr de lui malgré les gaffes qu'il accumule, tandis que Flupke paraît toujours un peu plus hésitant, comme s'il savait d'avance ce qui allait se passer.

 

Quant à l'agent n° 15, nous lui avons donné une belle voix grave, mais l'avons rendu un peu bégayant dans les moments de colère; son autorité est donc encore plus bafouée qu'elle n'était. Tous ces petits détails ne figuraient pas dans les albums d'Hergé, mais je crois qu'ils ne font que développer et renforcer l'univers qu'il avait mis au point. »

 

Qui sont véritablement Quick et Flupke? Dans quel monde vivent-ils? Johan De Moor, qui, au sein des Studios Hergé, s'est plus particulièrement attaché à faire revivre ces deux garnements insupportables et délicieux, nous aide ici à mieux les connaître.

 

Benoît Peeters — Quelle est votre vision de ces deux petits personnages ?

 

Johan De Moor — Ce qui me semble frappant et particulièrement attachant chez ces deux garnements, c'est que ce sont déjà des enfants de la crise. Hergé les a imaginés juste après le début de la grande dépression de 29 qui a tant de points communs avec les années que nous vivons.

 

Malgré toutes les différences évidentes, ces gosses-là vivent dans le même monde que la plupart des enfants d'aujourd'hui, contrairement à des personnages comme Boule et Bill par exemple, caractéristiques de l'euphorie des années 60.

 

Énormément de héros de BD sont nés pendant les années de croissance, à l'époque de la société des loisirs, alors que dans « Quick et Flupke», on a affaire à des personnages dont les parents se soucient plus des fins de mois et de la hausse des prix que des devoirs des enfants.

 

Il suffit d'ailleurs de lire quelques gags pour se rendre compte que Quick et Flupke ne sont pas des fils de médecin ou de notaire. Hergé ne montre pratiquement jamais leurs parents, mais le peu qu'il nous en laisse voir montre bien qu'ils n'appartiennent pas à un monde de privilégiés.

 

Ce sont donc des enfants habitués à devoir compter sur eux-mêmes et à se débrouiller en toutes circonstances. B.P. — Ce contexte social est peut-être une des raisons qui permet la reprise de cette série; elle est redevenue très actuelle de ce point de vue.

 

En plus, j'imagine qu'il est toujours intéressant dans une série humoristique d'avoir des enfants qui se confrontent maladroitement à des problèmes qui ne sont pas à leur échelle. Deux gamins qui font des bêtises mais qui veulent s'attaquer au chômage, cela crée une disproportion amusante.

 

J.D.M. — Absolument. Cela permet de renouveler l'humour. Et de traiter de problèmes qui sont familiers aux jeunes lecteurs d'aujourd'hui sans tomber dans le didactisme.

 

B.P. — L'école inspire-t-elle aussi des gags?

 

J.D.M. — Oui, nous venons d'en terminer un où ce sont les élèves qui doivent élire leur professeur: ceux-ci viennent se présenter humblement devant eux, avec des propositions plus démagogiques les unes que les autres.

 

B.P. — II y avait quelques gags scolaires dans les histoires dessinées par Hergé, mais le thème n'était pas très développé.

 

J.D.M. — On ne les voyait pas en classe, ils longeaient à peine les couloirs. En fait, de toute évidence, l'école ne les intéresse pas.

 

B.P. — Ils n'ont pas le profil des bons élèves.

 

J.D.M. — Non, et, à mon avis, Quick a même redoublé une ou deux fois : il est en 4e et devrait être en 5e ou 6e alors que Flupke est en 3e et finira par le rattraper. Ils se retrouvent dans la même classe.

 

B.P. — Une des raisons qu'Hergé invoquait pour ne pas avoir continué «Quick et Flupke» est son côté trop visiblement belge. Apparemment, c'est justement une des choses que vous avez conservées et développées.

 

J.D.M. — Oui, il y a un inconscient collectif qui impose cet accent bruxellois. Je crois qu'aujourd'hui cela peut très bien passer. Après tout, tous les gosses du monde ont leur patois ou leurs mots à eux. Il ne me semble pas que cet aspect nuise le moins du monde à l'universalité de la série.

 

B.P. — Donnez-vous des références belges précises ?

 

J.D.M. — Oui, les trams notamment...

 

B.P.  — Et les inscriptions sur les murs, les noms de rues?

 

J.D.M. — Non, pour des raisons de traduction, mais les vitrines par exemple sont typiques d'ici. Ce qui est drôle, c'est que les Français croient souvent reconnaître leurs propres décors...

 

B.P. — Les deux prénoms sont typés aussi, Flupke surtout.

 

J.D.M. — Et ils vont être imposés dans toutes les langues. Ils ne seront jamais traduits. Je trouve qu'ils font partie des personnages, je les vois difficilement s'appeler John et Henry.

 

B.P. — Par rapport aux États-Unis par exemple, ça ne gêne pas d'avoir ce côté très européen ?

 

J.D.M. — Non, au contraire, ce côté local leur plaît. Pour eux, c'est quelque chose d'aussi exotique que le western ou le film noir peuvent l'être pour nous.

 

B.P. — Jusqu'à présent «Quick et Flupke» ont toujours été écrasés par «Tintin».

 

J.D.M. — Oui, c'est normal. Hergé lui-même, rapidement, semble ne plus avoir cru tellement à cette série. Il suffit de regarder les albums: tout petits, sans titres individuels, ils ont toujours été infiniment moins attrayants que les Tintins. A elle seule, la nouvelle présentation devrait aider à les faire découvrir ou redécouvrir.

 

B.P. — Allez-vous donner une unité à chaque volume?

 

J.D.M. — Les premiers recueils publiés par «Le Petit Vingtième» ne présentaient aucune unité. Nous avons conservé ce principe: dans chaque album, on entre directement dans l'action, sans présentation; il s'agit uniquement d'éviter qu'il y ait trois histoires sur le même thème dans un seul album. Notre seul principe est donc de rendre chaque volume aussi varié que possible. Après tout, la fantaisie et le désordre sont les maîtres-mots de cette série.

 

Deux des rares apparitions des parents de Quick et Flupke dans les gags réalisés par Hergé.

 

 

 

Couvertures des trois premiers recueils de «Quick et Flupke» nouveau look.

 

     

 

 

 

 

 

 

 

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