Lettrage et lignes

Le lettrage (lettering) du dessin industriel doit être dessiné et non pas écrit en écriture courante. En plus de présenter très lisiblement — lorsqu'il est bien fait — les légendes, les dimensions ou cotes et autres renseignements pertinents, il contribue à l'apparence générale du dessin.

Pour le lettrage des dessins de machines on utilise un style d'écriture carrée et uniforme appelé lettrage rectiligne ou lettrage bâton (single stroke lettering). Il s'agit de lettres formées d'un trait vertical ou penché du crayon ou de la plume.

Avec un peu de pratique et beaucoup d'application, on arrive à réussir ce lettrage simple, équilibré, dont les lettres sont tracées d'après une formule qui est aujourd'hui standardisée. Les dessinateurs industriels utilisent à peu près exclusivement les majuscules ou capitales droites pour les titres, tandis que les majuscules penchées et plus rarement les minuscules servent pour les sous-titres et les explications complémentaires.


Fig. 36.— Ordre dans lequel doivent être tracés les traits formant chaque lettre majuscule et chaque chiffre de l'alphabet, ainsi que les fractions. On notera les proportions attribuées à chaque élément du lettrage.


Fig. 37.— Technique de l'espacement et de la formation des lettres minuscules droites.

Les lettres droites

On trouvera dans nos fig. 36 et 37 les proportions, la méthode de faire le tracé ainsi que la technique de l'espacement des lettres droites (vertical letters) et des chiffres habituellement employés dans le lettrage industriel. Afin d'obtenir un alignement précis, on trace légèrement, au crayon, des lignes guides au sommet et au bas de l'espace que doivent occuper les lettres.

Ces lignes peuvent être tracées à l'aide du Té ou d'un triangle de lettreur (guide-line triangle) comme celui que fait voir notre fig. 40. La technique à suivre et l'ordre dans lequel chaque trait doit être tracé sont clairement indiqués par les flèches qui accompagnent chaque lettre et chaque chiffre dans nos fig. 36 et 37.

Les chiffres donnent l'ordre dans lequel chaque trait doit être tracé. En suivant scrupuleusement cet ordre, consacré par l'expérience et des multitudes d'essais, vous acquerrez rapidement le tour de main qui vous permettra d'exécuter un lettrage uniforme et de belle apparence.

On a groupé ensemble les lettres qui ne sont faites que de traits droits, puis les lettres et chiffres qui comportent à la fois des traits droits et des courbes, enfin le lettrage formé exclusivement de courbes. Les lettres G, S, O, Q et C doivent dépasser légèrement les lignes guides du haut et du bas si l'on veut éviter qu'elles paraissent plus petites que leurs voisines.

Le corps même des minuscules occupe les deux tiers de la hauteur donnée aux majuscules à compter de la base, tandis que les jambages doivent s'élever jusqu'à la ligne guide du sommet servant aux majuscules; les descendantes — c'est-à-dire les lignes qui descendent en dessous du corps même de ces lettres — doivent se rendre au tiers de la hauteur donnée aux majuscules.

Quant aux chiffres constituant des fractions, ils doivent avoir chacun les deux tiers de la hauteur donnée aux chiffres normaux du dessin, ce qui les oblige à excéder, par le haut et par le bas, les limites normales du lettrage.

Pour les proportions à donner aux différents éléments du lettrage, on se reportera à la ligne du bas de notre fig. 36. On y verra que chaque ligne de lettrage est divisée en trois parties égales sur sa hauteur, ce qui permet d'assurer à chaque lettre (majuscule ou minuscule), à chaque chiffre et à chaque fraction des proportions agréables.


Fig. 38.— Lettres penchées généralement employées dans le dessin industriel. L'ordre et la technique de formation de ces lettres sont les mêmes que pour les lettres majuscules droites de la fig. 36.


Fig. 39
.— Alphabet minuscule et technique d'espacement des lettres penchées.

Les lettres penchées

Les fig. 38 et 39 montrent comment sont formées les lettres et les chiffres penchés. Les règles qui président au tracé de ces lettres, à la relation qui doit exister entre leur largeur et leur hauteur, ainsi qu'à leur espacement, sont les mêmes que pour les lettres verticales.


Fig. 40.— Triangle de lettreur pouvant servir de guide pour l'espacement en hauteur des lettres et leur inclinaison.

On s'accorde à donner une pente de 68° au lettrage penché, cette pente étant reconnue comme la plus agréable à l'œil. En général, on obtient cette pente en se référant à la fente inclinée du triangle de lettreur que fait voir notre fig. 40, mais on peut aussi l'obtenir en ayant recours au procédé que nous illustrons en fig. 41. Ce procédé consiste à mesurer 5 unités sur la verticale et à en appliquer 2 sur l'horizontale afin de donner à l'équerre allongée la position voulue et de placer ensuite le Té à l'angle ainsi formé. On procède pour les traçages des obliques comme le montre le croquis 41.


Fig. 41.— Procédé pour obtenir l'inclinaison standard de 68° à l'aide du Té et de l'équerre allongée.

Espacement du lettrage

Parmi les facteurs les plus importants d'un beau lettrage il faut compter l'espacement. On entend par là la distance qui doit séparer chaque lettre de celle qui la précède et de celle qui la suit. Un espacement bien calculé donne l'illusion qu'une distance égale sépare chaque lettre alors qu'en fait il n'en est rien.

La forme des lettres varie; d'aucunes sont formées de traits obliques, d'autres de lignes droites, d'autres enfin de courbes; il en est qui arborent des traverses plus ou moins longues. Il s'ensuit qu'aucune règle fixe ne saurait être donnée pour l'espacement, si ce n'est qu'il faut y faire montre d'un bon coup d'œil et d'un jugement juste.

En pratiquant — surtout avec les lettres arrondies — on arrivera à laisser entre chacune un espace uniforme. Les lettres formant un mot doivent être placées de telle manière que le mot paraisse bien équilibré et ne présente nulle part d'espaces trop blancs ou trop sombres. Il faut laisser plus d'espace entre deux lettres dont les bords sont strictement verticaux qu'entre deux lettres dont les bords de l'une sont verticaux et ceux de l'autre arrondis.

Par contre, on espacera moins deux lettres aux contours arrondis comme "00" ou "DO". L'espace qui sépare "AL" à leur base doit être réduit de manière à faire paraître moindre le vide qui reste à leur sommet. Les lettres à bords verticaux ou droits sont celles dont l'espacement présente le moins de difficultés. (Voir fig. 37 et 39).

Guides ou pochoirs

Divers types de guides ou pochoirs ont été imaginés afin de mécaniser en quelque sorte l'espacement du lettrage industriel. Parmi ceux-ci il faut compter le guide Wrico (fig. 42) qui est très fréquemment employé dans les ateliers de dessin industriel.


Fig. 42.— Pochoir Wrico utilisé avec le tire-ligne spécial de même marque.

C'est une sorte de gabarit dans lequel sont découpés les contours des lettres et des chiffres. En suivant ces contours à l'aide d'un crayon ou d'un tire-ligne Wrico, on obtient avec rapidité un lettrage uniforme. Il importe cependant de posséder un pochoir différent pour chaque format de lettres et chiffres; toutefois le même tire-ligne peut servir pour plusieurs des pochoirs.

Ces derniers sont généralement fournis en une trousse, comprenant aussi les tire-lignes, qui permet d'effectuer les formats de lettrage les plus communément requis des dessinateurs industriels (draftsmen).

On ne saurait trop insister sur la valeur qu'un lettrage bien fait confère à un dessin industriel. Certaines écoles attachent au lettrage une importance aussi grande qu'au dessin lui-même dans l'attribution des points aux débutants.

La méthode que nous venons d'indiquer est simple. Elle permet d'exécuter un lettrage qui est reconnu partout parce qu'il est standardisé. Conséquemment, on ne doit s'accorder avec elle aucune liberté — dans le lettrage industriel toute fantaisie est interdite et ne peut que discréditer son auteur aux yeux des experts.

En outre, le dessinateur industriel ne doit pas oublier la responsabilité dont il est investi. Si, par un lettrage confus ou maladroit, une erreur venait à se produire dans l'exécution du travail dont on lui a confié le dessin, il pourrait s'ensuivre non seulement une perte de temps et de matériel, mais parfois des accidents de personnes.

Finalement, un lettrage mal réussi gâte l'apparence du meilleur dessin et dénote chez son auteur une piètre habileté manuelle. On se rendra compte par les exemples que nous donnons plus loin dans ce volume du soin qu'apportent les dessinateurs à bien lettrer leurs plans. D'ailleurs, c'est par l'examen des plans et croquis bien exécutés que l'on en viendra à acquérir le goût qui permet à la fois de bien dessiner chaque lettre et chaque chiffre individuellement, et de donner à l'ensemble du dessin un véritable fini professionnel.

Les lignes conventionnelles

On peut voir en fig. 43 et 44 plusieurs variétés de lignes ou traits bien caractéristiques ainsi que leur application au dessin industriel. La force relative de ces traits est donnée en rapport avec les dessins à l'encre. Ceux qui sont tracés au crayon ne comportent guère que deux épaisseurs de traits: les traits moyens et les traits fins, les premiers étant employés partout où, dans notre fig. 44, des traits forts et moyens sont indiqués.


Fig. 43. et 44. — (a) Quelques applications des lignes conventionnelles à l'interprétation d'un dessin de machine, (b) Lignes conventionnelles du dessin industriel avec le sens qu'on leur donne.

Voici à quel usage sont employés chacun de ces traits:

Les traits très forts (1) servent presque uniquement à encadrer le dessin sur la feuille et à en délimiter la surface (border Une).

Un trait fort (2) est employé pour marquer les contours visibles (object outlines) d'un objet.

Les contours invisibles (hidden outlines) d'un objet dessiné sont représentés à l'aide d'un tiretage continu et régulier (3), dont les tirets ont environ 1/8 de pouce chacun.

On laisse entre chaque tiret l'équivalent d'environ deux fois l'épaisseur du trait. Une ligne indiquant un contour invisible commence par un tiret et finit par un autre tiret à ses extrémités; par ailleurs, si une ligne comporte à la fois des arêtes visibles et invisibles, on doit laisser un vide — un espace — entre la partie visible et la partie invisible. Aux angles des intersections de deux contours invisibles, les tirets doivent se toucher.

Au point de tengence par rapport à un arc, toute ligne invisible doit commencer par un tiret.

Une courte ligne brisée servant à indiquer une coupure courte (break Une) (4) se trace à main levée. Pour les lignes brisées d'une certaine longueur on a recours à une règle et l'on intercepte le trait de zigzags à des intervalles réguliers (5). Les lignes brisées servent à indiquer:

a) que l'objet se continue sans changement quant aux détails. La manière d'indiquer une cassure dans les formes rondes et pleines, rondes et évidées, ainsi que dans les formes rectangulaires pleines se trouve nettement expo sée par notre fig. 45 ;

b) que seulement une partie de l'objet entier est représentée dans le dessin;

c) qu'une section a été rabattue par rota-tion (revolved in place).

Un plan de coupe (cutting plane) est indiqué par un trait qui comporte un tiret long suivi de deux tirets courts (6). Les extrémités du trait se terminent par des flèches à angle droit qui servent à indiquer de quel point de vue la coupe a été prise.


Fig. 45.— Lignes de cassure: 1) section circulaire pleine; 2) section tubulaire; 3) section carrée.

Des tirets longs, égaux et continus (7) servent à indiquer une position alternative de l'objet dessiné — lorsqu'il s'agit d'organes mobiles de machines, par exemple. Des tirets du même genre servent à indiquer l'emplacement d'un organe voisin (adjacent part) (8).

Un pointillé fin (stitch line) est employé pour indiquer une couture (9).

La ligne d'axe (center Une) sert à indiquer le centre ou axe de l'objet dessiné (10) ou de l'un de ses organes. Cette ligne, faite d'un tiret long alternant avec un tiret court, sert également à indiquer le centre des trous à forer ou des courbes.

Les hachures (section lines) comportent de multiples traits fins rapprochés les uns des autres, verticaux, obliques ou horizontaux, et qui servent soit à indiquer la section ou coupe d'un objet à un point donné (11), soit à donner la nature du matériau employé. Cette dernière indication est fournie d'après un code conventionnel généralement accepté en Amérique du Nord et que notre fig. 46 reproduit en détail. (Voir aussi fig. 100)


Fig. 46.— Quelques teintes et hachures conventionnelles.


Fig. 100.— Hachures conventionnelles servant à identifier dans les coupes les substances les plus usuelles.

Une ligne de cote (dimension line) et les chiffres qu'elle comporte sert à indiquer la distance entre deux points de l'objet dessiné. Des flèches marquent chacune des extrémités de ce trait (12).

Afin de situer les limites de distance que la ligne de cote indique on utilise la ligne d'attente des cotes (extension lines) (13).

Enfin, les traits de projection (projection lines) (14) servent à établir les relations conventionnelles entre différents profils d'un objet.

Après que les différentes lignes d'axe ont été tirées à l'encre, les traits continus doivent  être encrés dans l'ordre suivant: les cercles, les arcs, les courbes irrégulières, les lignes horizontales, verticales et penchées. Ensuite, on tire à l'encre et dans le même ordre les lignes tiretées (dash ou broken lines) qui servent à indiquer les parties invisibles de l'objet. Finalement, ce qui reste de lignes d'axe, de cote, d'attente de cote, d'encadrement, de même que les hachures.


Fig. 47.— Encrage des traits au crayon: 1) pour les angles et les traits continus; 2) pour les courbes irrégulières; 3) pour les tangentes.

On doit superposer exactement aux traits de crayon les traits à l'encre. Notre fig. 47 fait voir, en (1), la manière de s'y prendre pour tracer un arc et pour le joindre à un trait continu. Le croquis (2) montre comment une courbe irrégulière doit se superposer exactement sur le tracé au crayon lorsqu'il s'agit de l'encrer. Enfin, en examinant attentivement le croquis (3) on verra le procédé à suivre pour encrer les lignes formant tangente — aux points où se joignent les traits l'épaisseur ne doit augmenter d'aucune manière.

 

 

 

 

 

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