Les transformateurs

Éclairage Et Installation Électriques 1961

Leur fonction

Les transformateurs (transformers) tiennent leur nom du travail qu'ils accomplissent: ils transforment l'énergie électrique. Supposons qu'il vous faille alimenter un poêle électrique à 220 volts, un système d'éclairage à 110 volts et une clochette d'alarme à 6 volts.

Emploieriez-vous trois générateurs différents pour produire ces trois potentiels inégaux ?

Évidemment non !

Vous utiliserez des transformateurs, et alors le même générateur pourra alimenter les trois systèmes, chacun à son potentiel propre.

Si votre génératrice produisait par exemple 110 volts (potentiel requis par notre circuit d'éclairage), un transformateur hausserait ce potentiel à 220 volts (pour le poêle électrique), tandis qu'un autre le réduirait à 6 volts (pour la clochette d'alarme).

Il semble qu'à ce jeu on obtient un gain gratuit de courant. Il n'en est rien toutefois. Les transformateurs n'augmentent ni ne diminuent l'énergie électrique. Notez bien que l'énergie égale le potentiel multiplié par le courant.

Et quand un transformateur modifie le potentiel, il altère aussi le courant. Si vous augmentez le voltage, le courant diminue. L'un monte tandis que l'autre descend. Le potentiel et le courant d'un circuit sont modifiés par le transformateur. Mais l'énergie totale demeure la même.

LEUR FONCTIONNEMENT

Le transformateur n'est pas autre chose qu'un circuit de self-induction ou mieux d'induction mutuelle.

Cela devrait vous faire deviner tout de suite qu'il comporte:

1 ° Un noyau de fer ;

2° Deux circuits électriques ;

3° Un champ de lignes de force qui transforme l'énergie en passant d'un circuit à l'autre.

La fig. 37 représente un transformateur simple.

Fig. 37.— Transformateur simple.

Les transformateurs modernes ne sont évidemment pas construits de cette façon, mais le diagramme illustre tout principe mis en application dans chaque transformateur.

Disons d'abord que le noyau constitue un circuit complet tout en fer, transmettant des lignes de forces. C'est là que s'échange l'énergie entre les deux circuits. Le rendement d'un transformateur dépend de son noyau, qui est toujours agencé de manière à véhiculer le maximum de lignes de force.

Étudiez ensuite les deux circuits — ils consistent en fils enroulés (windings) autour de l'armature du noyau. La bobine qui reçoit l'énergie s'appelle le primaire.

Dans la fig. 37, l'enroulement gauche est relié aux fils d'amenée: c'est le primaire.

L'autre enroulement, connecté au circuit d'utilisation, est le secondaire.

Dans l'illustration, l'enroulement droit alimente le circuit de consommation (load) c'est le secondaire. Ne vous basez jamais sur le nombre de spires des enroulements pour définir ceux-ci. L'enroulement connecté à la source de courant est toujours le primaire; l'enroulement relié au circuit d'utilisation est invariablement le secondaire.

Dans la fig. 37, par exemple, si l'on intervertissait les connexions de la source et du circuit d'utilisation, les noms des enroulements en seraient eux aussi inversés.

A noter aussi le champ qu'engendre le primaire du transformateur, et que la fig. 38 illustre mieux que la précédente. Or, vous savez déjà qu'il s'agit ici d'un circuit d'induction mutuelle.

Et vous savez aussi que pour qu'il y ait transmission d'énergie, les lignes de force doivent être interceptées. Mais, ni le primaire ni le secondaire ne peuvent se déplacer.

Donc, c'est le champ lui-même qui devra le faire. Ceci implique de toute nécessité que seuls le courant alternatif ou le courant continu pulsatoire peuvent être utilisés dans les transformateurs, car seuls ils peuvent engendrer des champs mobiles.

Supposons qu'un courant alternatif de 60 cycles alimente le primaire, dans la fig. 38.

Fig. 38.— Amorçage d'un champ par le circuit primaire dans un transformateur.

Tout de suite s'amorce la circulation d'un champ autour de chaque spire du primaire. Le noyau conserve ce champ et le transmet au secondaire.

Au secondaire, chaque spire intercepte le champ. Le secondaire induit le potentiel, et l'énergie passe ainsi du primaire au secondaire. Vous savez que dans le courant alternatif de 60 cycles, le courant change de direction 120 fois par seconde (soit deux périodes ou alternances au cycle).

Le secondaire est donc coupé 120 fois à la seconde. La fréquence du secondaire est donc exactement la même que celle du primaire.

Nous avons en fig. 39 un transformateur typique.

Fig. 39.— Transformateur typique avec ses enroulements primaire et secondaire.

Regardez les indications du voltmètre (V).

Le voltage du primaire (Ep) est de 110 volts. Celui du secondaire (Es), 220 volts. Notez bien que le secondaire n'est connecté à aucun circuit d'utilisation, mais reste en circuit ouvert.

Le courant secondaire est donc de zéro volt. Mais combien de courant y a-t-il dans le primaire ?

En consultant le circuit, vous verrez que le primaire est branché directement sur une ligne de 110 volts. Vous vous attendiez d'avoir un courant puissant ; mais bien à tort, car le voltage de self-induction (Esi) dans le primaire est très élevé.

Les enroulements serrés et le noyau de fer font que chaque spire intercepte la presque totalité des lignes de force de la bobine. Il résulte que Esi égale presque Ep. Mais il lui est non seulement égal, mais inverse.

Et cet Esi égal et contraire étouffe le courant jusqu'à un potentiel très faible. Le petit courant qui parvient à s'échapper porte le nom de courant magnétisé du transformateur.

Prenons comme exemple la fig. 39. La résistance de la bobine y est de 10 ohms. Et le voltage de self-induction est de 109 volts.

Nous en obtenons les valeurs suivantes:

EP = 110 v.
Esi = 109 v.
R = 10 Ω

T= (110 - 109) / 10 = 1/10 amp. (au moyen de la loi d Ohm).

Le courant magnétisé n'est donc ici que d'un dixième d'ampère.

Esi est ici soustrait de Ep, parce qu'ils sont contraires, c'est-à-dire qu'ils se combattent ; il faut donc les soustraire l'un de l'autre pour obtenir le potentiel net affectant le courant. C'est un peu comme la contre fem (fem = force électromotrice) dans un moteur à courant continu.

Mais pourquoi obtient-on 220 volts au secondaire ?

Voici.

Le champ magnétisé du courant produit 109 volts de self-induction dans les 11 spires du primaire. C'est un petit peu moins de 10 volts par spires.

 Mais disons que c'est 10 volts juste. Y a-t-il une seule raison pour laquelle ce champ ne produise pas le même voltage, soit 10 volts par spire, dans la bobine secondaire?

Il n'y en a aucune ; les deux enroulements entourent la même armature, donc les lignes de force qui traversent l'un passent également par l'autre.

Mais, car il y a un mais, le secondaire a 22 spires. Et à raison de 10 volts par spire, cela fait 220 volts !

Ceci signifie que le rapport des potentiels est le même que celui des spires. En mathématiques, l'on exprimerait cette loi comme suit:

Ep / Es = Tp / Ts, équation dans laquelle:

Ep = le voltage primaire ;
Es = le voltage secondaire ;

Tp = le nombre de spires de l'enroulement primaire.
Ts = le nombre de spires de l'enroulement secondaire.

Supposons un transformateur à 600 volts ayant 2,400 spires dans son primaire. Quel sera le voltage dans le secondaire, s'il comporte 400 spires ?

Ep / Es = Tp / Ts

600 / ES = 2,400 / 400

Es = 600 * 400 / 2400 = 100 volts.

Voici une autre manière de faire les calculs. Combien y a-t-il de volts par spire dans le primaire ?

600 volts divisés par 2,400 spires, soit 1/4 de volt par spire. Le voltage par spire dans le primaire et le secondaire est à peu près égal, donc 400 spires multipliées par 1/4 de volt, donnent 100 volts dans le secondaire.

À noter que ce transformateur est du modèle réducteur: c'est un dévolteur; le potentiel y est réduit de 600 à 100 volts.

Le rendement des transformateurs est élevé : il atteint 98%. C'est pourquoi on peut négliger la faible différence entre Ep et Esi en calculant le voltage par spire.

Imposons maintenant une consommation de 44 ohms au transformateur de la fig. 39.

La fig. suivante (40) illustre le circuit complet que l'on pourra alors obtenir.

Fig. 40.— Circuit complet d'un transformateur.

Le courant dans le secondaire est de:

Is = Es / Rs = 220 /44 = 5 ampères

Voici le moment venu d'expliquer que le circuit d'utilisation contrôle le courant secondaire. Si le circuit d'utilisation est de 22 ohms au lieu de 44 ohms, le courant sera de 10 ampères au lieu de 5.

Le courant secondaire de 5 ampères est en sens inverse du courant primaire.

Ou, si vous préférez, le courant secondaire provient du potentiel qu'induit le champ primaire. Vous savez que Esi est contraire à Ep, et que Es aussi bien que Esi provient du champ primaire.

Donc, Es doit être inverse à Ep. C'est le même principe que dans les circuits à self-induction.

Quel est l'effet des courants opposés du primaire et du secondaire ?

Tout simplement, que leurs champs tendent à s'annuler mutuellement.

Les 5 ampères du secondaire établissent un champ qui détruit une partie de la force du primaire. Il en résulte moins de Esi et plus de courant primaire. Le courant primaire augmentera jusqu'à ce que la force du champ primaire contrebalance la force du champ secondaire.

La force de ces champs est déterminée par ampères-spires (IT). Quand 2 champs sont égaux, leurs ampères-spires sont égaux:

IpTp = IsTs ;

ou

Ip / Is = Ts / Tp

Ce qui signifie que les courants dans les deux enroulements sont inversement proportionnels au nombre de leurs spires.

Dans l'exemple suivant:

Ip / Is = Ts / Tp

Ip / 5 = 22 / 11

Ip = 22 * 5 / 11 = 10

d'où Ip = 10 ampères.

Ceci revient à dire que le courant primaire s'accroît à 10 ampères, pour un circuit d'utilisation secondaire de 5 ampères.

Supposons que le primaire d'un autre transformateur comporte 70 spires, et le secondaire, 350 spires, et que le circuit d'utilisation soit à 30 ampères.

Quel est le courant primaire ? On a la solution suivante:

Ip / Is = Ts / Tp

Ip / 30 = 350 / 70

Ip = 350 * 30 / 70 = 150

d'où Ip = 150 ampères.

L'on peut vérifier ces calculs, en supposant que les champs primaire et secondaire soient de force égale:

IpTp = IsTs

150 X 70 = 350 X 30

10 500 = 10 500

Ceci nous amène à une question très importante sur les transformateurs.

Nous l'avons déjà dit: le courant d'alimentation provenant du secondaire contrôle le courant primaire.

Toute modification au champ magnétique secondaire transforme le Esi du primaire et conséquemment le courant primaire. C'est un contrôle automatique.

Si aucun courant d'alimentation n'est prélevé du secondaire, le courant primaire est réduit presque à zéro (seul le courant magnétisé circule).

Quand le secondaire alimente un circuit d'utilisation, son courant augmente et le courant primaire augmente de concert avec lui.

LA PUISSANCE ABSORBÉE — LE DÉBIT

Vu le grand rendement des transformateurs (98%), on le considère généralement comme de 100% dans les calculs.

 Cela entraîne une légère erreur, mais la différence est négligeable à toutes fins pratiques. À 100%, la puissance absorbée par le transformateur égalerait son débit, ou

Pp = Ps

IpEp = IsEs

Vérifions ces équations en prenant l'exemple de la fig. 41 qui fournit les données à un excellent problème d'ordre pratique.

Fig. 41.— Application des lois fondamentales des transformateurs.

Pour Es, nous aurons:

Ep / Es = Tp / Ts

50 / Es = 250 / 1000

Es = 50 * 1000 / 250 = 200 v.

Et pour Is:

Is = Es / Rs = 200 / 80 = 2,5 amp.

Puis pour Ip:

Ip / Is = Ts / Tp

Ip / 2,5 = 1000 / 250

Ip = 1000 * 2,5 / 250 = 10 amp.

Avec Ps, l'on obtient:

Ps = EsIs ; Ps = 200 X 2.5 = 500w.

Et avec Pp :

Pp = EpIp ; Pp = 50 X 10 = 500w.

Notez que Pp = Ps.

SOMMAIRE

L'on peut résumer ce qui précède dans le sommaire suivant, qui nous fournit 3 équations importantes et 2 lois fondamentales.

Les équations

1: Ep / Es

2: Ip / Is = Ts / Tp

3: IpEp = IsEs

1° Le voltage de l'enroulement secondaire est toujours en sens inverse au voltage primaire.

2° La puissance absorbée par le primaire est contrôlée par le circuit d'utilisation du courant secondaire.

LES TRANSFORMATEURS MODERNES

Vous vous demandez peut-être pourquoi le rendement des transformateurs est si élevé.

La raison en est dans l'absence de pièces mobiles, qui produiraient du frottement mécanique, source de la plus grande déperdition d'énergie. Dans les transformateurs, la déperdition est insignifiante.

Les transformateurs modernes sont conçus dans le but de fournir le plus grand rendement possible. En général, les déperditions inévitables s'y produisent dans le noyau et les enroulements.

Les premières dépendent en partie de la résistance des aimants moléculaires du noyau de fer, qui doivent rebrousser chemin à chaque fois que le courant alternatif s'inverse.

Dans un transformateur de 60 cycles, les molécules doivent aller et venir 120 fois par seconde. Les molécules résistent à ce mouvement ; et leur tendance à l'inertie s'appelle hystérésis.

L'on peut définir cette hystérésis : une sorte de frottement.

Or, vous savez que le frottement produit de la chaleur.

Les noyaux de fer eux-mêmes se comportent comme les fils. Ils sont pénétrés par les champs de leurs enroulements, et véhiculent de petits courants induits. Ces courants circulent tous dans le noyau de fer.

On les appelle courants de Foucault. Or, ces courants produisent de la chaleur; ce sont à vrai dire de petits courts-circuits à l'intérieur du noyau.

Les déperditions dans le noyau dépendent donc de deux facteurs: l'hystérésis et les courants de Foucault. Les deux engendrent de la chaleur et entraînent des déperditions qui réduisent le rendement total.

Les autres déperditions dépendent exclusivement de la chaleur engendrée par le courant dans les fils de l'enroulement. Remarquez bien que le cuivre (et la plupart des autres conducteurs) accroît sa résistance à mesure que s'élève sa température.

Or, si on laisse s'accumuler la chaleur produite par les déperditions du noyau et des enroulements, les spires s'échaufferont.  Et plus elles s'échauffent, plus grande est leur résistance, et conséquemment plus grande aussi est leur déperdition d'énergie.

C'est là un cercle vicieux. Les déperditions produisent de la chaleur; la chaleur augmente les déperditions, et ainsi de suite, réciproquement.

RÉDUCTION DES DÉPERDITIONS DU NOYAU

L'on diminue les pertes par hystérésis en employant le fer doux ou un acier spécial dit à transformateur, contenant du silicone.

Ces métaux interchangent leurs molécules facilement, avec un minimum de frottement.

On obvie aux courants de Foucault en formant les noyaux de minces plaques de fer au lieu d'une masse solide. Dans cette structure laminée, on intercepte les courants de Foucault en isolant chaque plaque de ses voisines. Les courants persistent encore, mais ils sont si faibles que la déperdition est négligeable.

La fig. 42 illustre quelques noyaux de transformateurs. Notez bien qu'ils comportent tous des circuits magnétiques complets, des feuilles laminées et du fer en abondance.

Fig. 42.— Quelques noyaux typiques de transformateurs.

RÉDUCTION DES DÉPERDITIONS AUX ENROULEMENTS

Les enroulements doivent être aussi courts et gros que possible. Les spires courtes et les gros fils tendent à diminuer la résistance et la chaleur.

Finalement, la perte résiduelle qui subsiste dans les enroulements à cause de l'accumulation de la chaleur, est réduite par des installations spéciales de refroidissement.

Les bains d'huile, les radiateurs, les éventails servent à refroidir les transformateurs.

FORMES DE NOYAUX

II y a trois types généraux de noyaux.

Chacun offre des avantages particuliers, mais tous possèdent leurs enroulements primaire et secondaire autour de la même armature en fer.

La fig. 43 illustre ces trois types.

Fig. 43.— Trois types de transformateurs modernes a) à noyau ; b) transformateur cuirassé; c) transformateur cuirassé amélioré, qui possède les avantages des deux précédents.

Le transformateur à noyaux, représenté en A, se prête le mieux aux hauts voltages. Ses enroulements sont courts et les chutes de IR y sont réduites au minimum.

Le transformateur cuirassé a des enroulements plus longs, parce que la longueur de leur colonne médiane est le double des colonnes extérieures. Les chutes de IR sont plus grandes, mais le champ magnétique est plus court. Ce modèle est donc le mieux adapté aux charges à haut potentiel.

Le transformateur cuirassé modifié est une combinaison des deux autres, et il en comporte plusieurs avantages.

SYSTÈMES D'ENROULEMENTS

II existe deux systèmes d'enroulements pratiques pour chaque type de transformateurs.

La La fig. 44 fournit la coupe transversale de chaque système.

Fig. 44.— Coupe transversale des deux systèmes les plus pratiques d'enroulements de transformateurs.

1 ° L'enroulement cylindrique est formé d'un cylindre primaire et d'un cylindre secondaire. L'un est fixé au-dessus de l'autre. Puis, l'assemblage est glissé sur le noyau de fer.

2° L'enroulement en galette (pancake) sépare chaque enroulement en sections ou galettes. Puis on glisse sur le noyau de fer les galettes alternées de primaire et de secondaire.

Dans l'assemblage final, toutes les galettes du primaire sont connectées entre elles en séries, et toutes celles du secondaire sont également reliées en séries.

L'enroulement cylindrique est d'une construction un peu moins coûteuse, mais il est plus difficile à réparer.

 L'enroulement en galette est d'un coût plus élevé, mais il est plus facile à réparer parce qu'il est subdivisé en sections.

SOMMAIRE

Les transformateurs n'ont qu'un rôle: changer les valeurs du courant et du voltage, en y fournissant le meilleur rendement possible.

Leurs noyaux sont confectionnés de tôles, leurs enroulements raccourcis et l'usage des refroidisseurs artificiels y est courant. Ainsi équipé, le transformateur est l'appareil au rendement le plus stable dont dispose l'électricien.

Transformateurs Westinghouse utilisés pour modifier la valeur du courant sur les réseaux de distribution.

 

 

 

 

 

 

 

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