Potentiomètres et gain
Potentiomètres et gain... quel
drôle de titre.
Pourtant, ne vous êtes vous jamais posé une des questions suivantes :
Quel est le type de ce potentiomètre, rien n'est indiqué sur le schéma ?
Ce potentiomètre anti-logarithmique difficile à trouver, peut-il être remplacé
par un modèle linéaire ou logarithmique ?
Ce potentiomètre logarithmique peut-il être remplacé par un linéaire, ou
inversement ?
Les lois de variations sont certes différentes, mais si on adopte des valeurs
ohmiques identiques, ne peut-on pas s'accommoder d'une variation "manuelle"
différente ?
Il existe plusieurs types de montages (pré)amplificateurs, et les
potentiomètres mis en place pour permettre une modification du gain de l'étage
ne sont pas toujours câblés de la même façon. Ce petit article passe en revue
les montages les plus typiques et indique au travers de tableaux et de courbes,
les variations de gain que l'on est en droit d'obtenir selon la position du
curseur dudit potentiomètre. Il est ainsi possible de voir que dans telle ou
telle configuration, tel type de potentiomètre est plus adapté que tel autre.
Le classique potentiomètre de volume en entrée ou en sortie
Cette configuration de câblage
ne peut pas vous avoir échappée si vous aimez les montages audio. Il s'agit du
câblage type d'un potentiomètre branché en diviseur de tension, et qui permet de
prélever sur son curseur, une fraction plus ou moins importante du signal audio
qu'on applique entre ses deux bornes extrêmes, l'une des deux étant reliée à la
masse. Dans ce cas précis, on ne parle pas de gain (car la fonction est
entièrement passive), mais d'atténuation, que l'on peut aussi qualifier de gain
négatif (personnellement, je préfère éviter de parler de gain négatif quand il
s'agit d'atténuation, car confusion est parfois faite avec "gain assorti d'une
inversion de polarité"). Le schéma suivant montre un tel câblage, avec curseur
du potentiomètre en position centrale.
Dans cette position, on récupère au curseur du
potentiomètre moitié de l'amplitude du signal entrant. En réalité un tout petit
peu moins à cause de l'impédance de sortie de l'étage qui précède qui n'est pas
nulle, et de l'impédance d'entrée du montage qui suit qui n'est pas infinie,
mais on ne va pas chipoter. Si l'amplitude du signal d'entrée est de 700 mW,
alors l'amplitude du signal de sortie est de 350 mV, soit 6 dB d'atténuation (on
aurait 12 dB d'atténuation si le curseur était positionné à 25 %, car on aurait
dans ce cas au curseur le quart de l'amplitude du signal entrant). Le schéma
suivant montre la même chose, mais avec le curseur en position minimum, c'est à
dire entièrement tourné vers la gauche, tout contre la masse.
Dans cette position, le signal de sortie est à
son minimum. Minimum ne signifie pas nul, car il existe en fait une résistance
résiduelle dans le potentiomètre, même très faible, qui fait que le curseur ne
se retrouve pas complètement à la masse (résidu compris entre 0,1 ohm et 1 ohm,
par exemple). On a cependant une atténuation très forte qui laisse penser que
plus rien ne sort, et on s'en contente fort bien. Puis sur le schéma suivant, la
même chose mais cette fois avec le curseur en position maximale, c'est à dire
entièrement tourné vers la droite, tout contre le signal entrant.
Là, le signal entrant est transmis vers la
sortie avec son maximum d'amplitude. Certes, là encore le système ne peut se
targuer d'être 100 % transparent puisque la valeur totale du potentiomètre, même
si elle est élevé, contribue à une atténuation légère puisque combinée à
l'impédance de source du circuit qui précède. Mais cette atténuation faible est
négligeable.
Variations min - max
Dans ce montage, la loi de
variation d'un point de vue électrique est facile à mettre "en équation". Si le
potentiomètre est de type linéaire, et que le curseur est en position centrale,
l'amplitude du signal récupéré en sortie est moitié du signal appliqué en entrée
(-6 dB). Et quart de l'amplitude (-12 dB) à 25 % de la course du potentiomètre,
et dixième de l'amplitude (-20 dB) à 10 % de sa course. On pourrait penser que
c'est là chose idéale, puisque à priori la puissance sonore du signal qui sera
amplifié par la suite répondra à la même loi de variation : mi-puissance à
mi-course. Mais point du tout. La variation de puissance ne répond pas à une loi
"linéaire" par rapport à la variation de tension, tout du moins dans le sens
"perception sonore" du terme. L'oreille à une sensibilité de type
"logarithmique", il faut que la puissance double (+3 dB) pour en percevoir une
augmentation sensible. Et c'est pourquoi mettre un potentiomètre linéaire pour
un réglage de volume est possible mais donne une impression de "réglage bizarre"
entre les doigts. Oh, et pour rappel : +3 dB en puissance correspond à un
doublement de puissance, alors qu'en tension +6 dB correspond à un doublement de
tension (voir page Décibel). Bref, les correspondances ne sont pas si
simples qu'il peut paraître à première vue, et on peut parfois se gratter la
tête, si tant est qu'on en possède une. Remplacer le potentiomètre linéaire par
un modèle logarithmique permet de comparer les "courbes" de variation que l'on
pourrait avoir avec chacun d'eux, pour le montage en diviseur de tension vu
ci-avant :
On constate d'office une répartition plus étalée des valeurs
d'atténuation exprimées en décibels, quand le potentiomètre est de type
logarithmique, même si l'on a toujours un tassement important en début de
course, dans les dix premiers pourcents. En pratique, l'effet d'atténuation est
plus rapide quand le curseur du potentiomètre log est situé au maximum et qu'on
le tourne vers la gauche, c'est à dire quand on baisse le volume. On a
l'impression qu'il "agit mieux".
Remarques
sur ces derniers dessins, les valeurs en
pourcentage expriment la position relative du curseur du potentiomètre et non le
taux d'atténuation, bien que cela soit la même chose pour le potentiomètre
linéaire.
la valeur d'atténuation -100 dB indiquée à la position 0 % n'est pas
"réelle", elle est en théorie infinie. Mais -100 dB correspond tout de même à
une atténuation de 100000 (cent mille) !
Mais au fait, un potentiomètre logarithmique n'étant pas symétrique par
rapport à son centre, que se passerait-il si on inversait ses deux pattes
extrêmes ? Et bien nous aurions ceci :
Intéressant, non ? L'emploi d'un potentiomètre logarithmique inversé ou
d'un potentiomètre anti-logarithmique ne présenterait ici que fort peu
d'intérêt, vu que la variation du curseur permet une évolution de l'atténuation
sur une plage de seulement 6 dB sur 90 % de la pleine échelle. Cherchez donc à
peaufiner le volume sonore avec un tel étalement ! Inutile de s'étaler plus sur
le sujet...
Remarque : un potentiomètre de type logarithmique monté à l'envers n'est ni plus ni moins qu'un potentiomètre de type anti-logarithmique dont le sens de rotation du curseur est inversé.
Avant ou après l'ampli ou le préampli ?
Cela n'a pas vraiment de rapport
avec nos affaires de gain, mais cette question m'a été posée plusieurs fois et
on peut prendre le temps d'en parler. Doit-on placer le potentiomètre de niveau
avant l'étage d'amplification, ou après ?
On peut faire les deux, cela dépend de la situation. L'étage
amplificateur possède un certain gain (un certain taux d'amplification), est
fabriqué avec des composants choisis par son concepteur, et est alimenté sous
une certaine tension d'alimentation, qui peut valoir quelques volts ou quelques
dizaines de volts. Ces critères conduisent à l'acceptation d'un signal d'entrée
dont l'amplitude doit être comprise dans une fourchette de valeurs permettant un
fonctionnement nominal. Amplitude du signal d'entrée pas trop faible pour ne pas
être noyé dans le souffle, et amplitude du signal d'entrée pas trop forte pour
ne pas saturer l'entrée de l'amplificateur. Cette deuxième condition détermine
en grande partie si un potentiomètre doit être placé à l'entrée de
l'amplificateur. Si le signal appliqué à l'entrée risque d'être trop fort, il
est recommandé d'insérer un potentiomètre pour en réduire l'amplitude dans une
juste proportion, pour éviter toute saturation (écrêtage).
En même temps, il ne faut pas oublier qu'un étage préamplificateur ne donne satisfaction que si le signal d'entrée est assez fort - par rapport à sa sensibilité d'entrée, sinon on doit amplifier plus pour un même niveau de sortie et on dégrade le rapport signal / bruit, que l'on souhaite toujours le plus grand possible. Dans le cas où le signal d'entrée est "conforme" à ce qu'attend l'étage d'amplification, aucun potentiomètre de niveau n'est nécessaire. Autre point qui a son importance : un potentiomètre classique à piste carbone, comme toute résistance classique de même famille, produit du souffle (du bruit) qu'on ne peut négligé (surtout s'il possède une valeur élevée) dès lors que l'on travaille à faible niveau. Si l'on travaille avec un préampli à grand gain (supérieur à +50 dB par exemple) et que la source sonore à amplifier possède une amplitude nominale de l'ordre de quelques centaines de uV (quelques dixièmes de mV), un potentiomètre n'est guère le bienvenu avant l'étage de préamplification. Si par contre l'amplitude du signal source est de plusieurs dizaines ou plusieurs centaines de mV, ce point est nettement moins critique, ce qui explique en partie que les potentiomètres de niveau câblés juste après un micro guitare passif ne soient pas plus décriés que ça, même si bien sûr l'ajout d'un petit préampli ou "booster" entre micro guitare et potentiomètre est souvent recommandé (surtout si on emploie une grande longueur de câble pour le raccord à l'ampli).
Correspondance entre position potentiomètre et gain préampli - Cas N° 1
Nous avons vu comment pouvait
"rendre" un potentiomètre câblé en atténuateur. Nous allons maintenant voir
comment se comporte la courbe de variation de gain d'un potentiomètre monté dans
un circuit actif, selon que son type est linéaire, logarithmique ou
anti-logarithmique. Pour cela, ressortons un vieux schéma qu'on nous sert à
toute sauce en milieu scolaire, celui d'un amplificateur linéaire non-inverseur
à amplificateur opérationnel (AOP), qui peut d'ailleurs fort bien servir de
préampli micro bas coût.
Dans ce schéma, le gain est déterminé par la
valeur de la résistance de contre-réaction R2, par la valeur de R3 et par la
position du curseur du potentiomètre RV1 qui est monté en résistance variable
puisque son curseur est relié à une de ses extrémités. La valeur exacte du gain
est déterminée par la formule mathématique simple suivante :
Gain = (R2 / (R3 + RV1)) + 1
Le gain est maximum quand RV1 est en position minimum et que sa valeur
est nulle.
Dans ce cas, on a
Gain = (10000 / 100) + 1 = 101 (ce qui correspond à +40 dB)
Le gain est minimum quand RV1 est en position maximum et que sa valeur
est maximale.
Dans ce cas, on a
Gain = (10000 / (100 + 10000)) + 1 = 2 environ (ce qui correspond à +6
dB)
Tout comme cela a été fait précédemment avec le potentiomètre monté en diviseur
de tension (pardon, en réglage de volume), voyons la "courbe" de gain de cet
étage amplificateur selon la position du curseur du potentiomètre RV1, quand il
s'agit d'un modèle linéaire et quand il s'agit d'un logarithmique. Parce que
vous avez bonne mémoire, je supprime les indications de pourcentage autour des
dessins et ne laisse que les valeurs de gain exprimées en dB. Plus tard, je
supprimerai tout pour voir ce que vous avez retenu.
Le moins que l'on puisse dire est que l'étalement permis par ces deux
types de potentiomètre n'est pas formidable, même si on juge les résultats moins
"désastreux" avec un potentiomètre linéaire. Voyons voir ce que donnerait un
potentiomètre logarithmique monté à l'envers ou un potentiomètre
anti-logarithmique dans toute sa splendeur et sa formidable capacité à rester
caché dans l'arrière boutique des revendeurs de composants électroniques.
Ah ! C'est déjà nettement mieux avec l'anti-logarithmique, tout de même !
Ce qui montre que chaque type de potentiomètre à finalement sa place. Votre
revendeur préféré ne possède pas de potentiomètre anti-log, et vous voulez
absolument finir votre montage pour le WE ? Vous pouvez utiliser un
potentiomètre logarithmique câblé à l'envers, mais il faut alors accepter de
travailler avec un gain qui va augmentant quand on tourne le curseur vers la
gauche, ce qui est loin d'être évident quand on n'a pas l'habitude ! Si c'est
pour un ajustage "définitif" avec un potentiomètre ajustable, n'ayez pas de
remords...
Correspondance entre position potentiomètre et gain préampli - Cas N° 2
Deuxième
cas d'école, celui d'un potentiomètre de réglage de gain dans un étage d'entrée
de type différentiel. Et comme un cas d'école est plus facilement digéré avec
une application pratique, j'ai pensé bon de reprendre le schéma du préampli
micro Green, dont le gain est fixé non pas par un potentiomètre, mais par une ou
plusieurs résistances fixes choisies parmi plusieurs grâce à un commutateur
rotatif. Ce montage est intéressant à étudier dans le cas qui nous concerne car
pas mal de monde a cherché ou cherche encore à remplacer le commutateur et ses
résistances par un unique potentiomètre. Le schéma qui suit est une version
édulcorée du schéma d'origine, qui reprend toutefois l'essentiel et fonctionne
heureusement de la même façon.
Première remarque : le commutateur rotatif et ses résistances associées
ont été remplacés par le potentiomètre RV1 de 1 KO. Parce qu'il faut bien mettre
quelque chose pour commencer. Deuxième remarque : le schéma d'origine (merci de
vous y reporter) montre qu'en fonction de la position du commutateur rotatif SW1
(appelé Gain rotary switch sur le schéma d'origine), le gain de l'étage préampli
peut aller de quelques +6 dB à +65 dB, ce qui couvre tout de même une bonne
plage de valeurs. Troisième remarque : les résistances mise en jeu pour le
réglage du gain sont de valeur très différentes : une résistance de 1,5 ohm pour
un gain de +65 dB et une résistance totale de plus de 150 KO pour un gain de +6
dB. Avec un commutateur rotatif, cela ne pose aucun problème de travailler sur
une telle étendue de valeur, mais avec un potentiomètre, c'est une autre paire
de manche. Dans les valeurs de gain les plus élevées (+30 dB à +65 dB), on
travaille avec des résistances de quelques ohms ou quelques dizaines d'ohms
seulement, et le saut est assez abrupte quand on passe vers les valeurs de gain
faibles. D'office, on voit qu'il va falloir faire attention dans le choix du
potentiomètre, ne serait-ce que pour sa valeur nominale (totale). En effet, si
on veut couvrir la même plage de valeurs de gain, il faut utiliser un
potentiomètre de 150 KO (pas facile à trouver) ou de 220 KO (plus facile à
trouver). Or, le réglage risque d'être quelque peu délicat dans le domaine des
fortes valeurs de gain, ce que montre les dessins suivants, selon que l'on
utilise un potentiomètre linéaire ou logarithmique.
Avec le potentiomètre linéaire, on dispose d'une plage de variation de
gain de +3 dB à +6 dB environ pour une variation de position du curseur de 90 %,
et une plage de variation de gain comprise entre +6 dB et +65 dB sur les 10 %
restant de la course du potentiomètre. Avec en prime le plus gros de la
variation sur le dernier pourcent de la course. Formidable. Avec le
potentiomètre logarithmique, non seulement ce n'est guère mieux, mais c'est
pire. L'usage d'un potentiomètre anti-log par contre, rend les choses plus
digestes :
On gagne en effet 6 dB de variation de gain sur les 90 % du "début" de
course du curseur. Mais ça reste tout de même sacrément pas pratique à régler !
La solution ? Puisque les variations de gain sont énormes pour les petites
valeurs ohmiques du potentiomètre, pourquoi ne pas prendre une valeur de
potentiomètre plus faible, par exemple 1 KO ou même 100 ohms ? Un potentiomètre
de 100 ohms permet de dilater un peu la plage de réglage dans les fortes valeurs
de gain, mais interdit en revanche de descendre le gain très bas, ce qui risque
de nous amener à de la saturation potentielle avec des microphones (ou
chanteurs) énergiques. Pour tout dire, le gain serait ajustable entre seulement
+35 dB et +65 dB, ce que l'on pourrait réserver à des sources qui ont toujours
besoin d'un gain minimal de quelques +30 dB. Comme vous le voyez, remplacer des
résistances fixes de valeurs très différentes par un potentiomètre unique n'est
guère évident. Pour bien faire, il faudrait un potentiomètre taillé sur mesure,
dont je vous laisse rêver le prix. Ah, au fait, avez-vous envisagé l'emploi de
deux potentiomètres en série, l'un de forte valeur (100 KO linéaire) et l'autre
de faible valeur (100 ohms anti-log) ? Pensez-vous que cela pourrait donner
quelque chose d'intéressant ? Je me demande tout de même si finalement, l'auteur
du préampli Green n'a pas bien fait d'utiliser un commutateur mécanique... Ca
simplifie bien les choses, et en version stéréo, l'équilibre entre les deux
voies est plus facile à obtenir. Enfin il me semble...