Pertes, échauffement et rendement des machines électriques
Nous avons déjà vu à la section Notions de mécanique et Thermodynamique que la transformation de l'énergie d'une forme en une autre au moyen d'une machine s'accompagne toujours d'une certaine perte de puissance. Cette perte se produit dans la machine elle-même et donne lieu:
1. à un échauffement des différentes parties de la machine;
2. à une diminution du rendement de la machine, la puissance débitée par la machine étant inférieure à la puissance qui lui est fournie.
L'étude des phénomènes occasionnant des pertes de puissance est d'un grand intérêt, car elle nous révèle comment ces pertes peuvent être réduites.
Dans cette section, nous analysons les pertes dans les machines à c.c., mais les mêmes remarques s'appliquent à la plupart des machines à courant alternatif.
Les machines électriques peuvent être classées en deux groupes: celles qui comprennent des parties tournantes (moteurs, génératrices) et celles qui n'en ont pas (transformateurs, réactances).
Des pertes électriques et mécaniques sont produites dans les machines tournantes;
dans les machines fixes, seules les pertes électriques sont produites.
Pertes mécaniques
Les pertes mécaniques proviennent:
1. du frottement dans les paliers ;
2. du frottement des balais sur le collecteur ou sur les bagues;
3. du frottement de l'air sur l'induit et sur le ventilateur destiné au refroidissement de la machine.
Les pertes qui proviennent du frottement du rotor sur des organes fixes (paliers, balais) contribuent à l'échauffement de la machine. Plus la machine tourne vite, plus les pertes mécaniques deviennent importantes.
Ces pertes dépendent de nombreux facteurs et il est très difficile de prédire leur valeur. Pour les déterminer avec exactitude, il faut faire des essais sur la machine.
Pertes électriques dans les conducteurs
Les pertes électriques sont divisées en deux catégories: les pertes dans les conducteurs et les pertes dans le fer. Dans les conducteurs, elles sont dues à l'effet Joule.
Elles s'expriment par la formule P = RI², où I est le courant qui parcourt l'enroulement de résistance R. Ces pertes se manifestent par la chaleur qui se dégage des conducteurs.
Dans le cas des moteurs et des génératrices, les pertes ont lieu dans l'enroulement de l'induit, dans les enroulements inducteurs (shunt et série), dans les balais, dans le rhéostat d'excitation et dans l'enroulement des pôles de commutation.
Au lieu d'utiliser la formule P = RI², il est parfois plus commode de calculer les pertes d'après la masse des conducteurs.
Les pertes massiques sont donnés par la formule:
(29-1)
où
Pmc = pertes massiques des conducteurs [W/kg]
J = densité de courant dans les conducteurs [A/cm2]
ρ = résistivité du conducteur [nQ.m]
ς = masse volumique du
conducteur [kg/m³]
10 = constante tenant compte des unités
On constate que les pertes par unité de masse sont proportionnelles au carré de la densité de courant dans le conducteur.
Comme ordre de grandeur, on utilise des densités variant de 150 A/cm² à 600 A/cm² pour les conducteurs en cuivre.
Les pertes correspondantes varient alors d'environ 5 W/kg jusqu' à 80 W/kg.
Les densités élevées requièrent un bon refroidissement pour éviter les températures excessives. La faible résistance des balais produit des pertes Joule négligeables comparativement aux pertes électriques occasionnées par la chute de tension entre le balai et le collecteur.
Cette chute varie ordinairement de 0,8 à 1,3 volts, selon le type de balai utilisé et la pression appliquée.
Dans les balais en carbone, on utilise des densités de courant beaucoup plus faibles que dans le cuivre, soit environ 10 A/cm² (Fig. 29-1).
Figure 29-1 Comparaison des densités de courant utilisées dans les conducteurs en cuivre et dans les balais

Exemple 29-1
L'induit de la Fig. 28-4 loge 243 bobines pesant chacune 0.35 kg.
Calculer les pertes Joule à une température de 120 °C pour une densité de courant (le 400 A/cm². La masse volumique du cuivre est de 8890 kg/m² et sa résistivité à 0 °C est de 15,88 nΩ.m (nanohm-mètre).
Solution
La masse totale du cuivre est:
m = 243 bobines x 0,35 kg/bobine = 85 kg
La résistivité du cuivre à 120 °C est:

D'après l'équation 29-1, les pertes massiques sont:

Les pertes Joule dans l'induit sont:
P = 43,2 W/kg x 85 kg = 3672 W = 3,67 kW
Pertes électriques dans le fer
Il ne se produit aucune perte dans une pièce de fer traversée par un flux qui ne change ni d'intensité, ni de direction.
Ainsi, lorsqu'un électro-aimant est excité par un courant continu, il se produit des pertes dans le cuivre de la bobine seulement; il n'y en a aucune dans le fer du noyau.
Par contre, des pertes importantes se produisent dans les parties en fer où le flux varie en grandeur ou en direction. C'est le cas du circuit magnétique des machines à courant alternatif dans lesquelles le flux est alternatif.
C'est aussi le cas de l'induit des machines à courant continu où le flux, bien que constant en intensité, change de sens périodiquement et rapidement. À noter que les pertes dans le fer d'un induit imposent un couple de freinage mécanique, tout comme les pertes par frottement sur les paliers.
Les pertes dans le fer sont attribuables au phénomène d'hystérésis et aux courants de Foucault.
1. Pertes par hystérésis.
On a vu que les pertes par hystérésis sont proportionnelles au nombre de fois où l'aimantation change de sens par seconde, donc à la vitesse de rotation des parties tournantes. Elles varient à peu près comme la densité de flux à l'exposant 1,6.
2. Pertes par courants de Foucault.
Pour expliquer les pertes par courants de Foucault, considérons un noyau cylindrique en fer qui tourne entre les pôles d'un aimant (Fig. 29-2a).
Figure 29-2 a. Tension induite dans un rotor plein ; b. Courants de Foucault résultants

En tournant, le noyau coupe des lignes de flux et, d'après le principe III de l'électromagnétisme, une tension est induite dans le noyau même, avec les polarités indiquées. Cette tension fait circuler des courants dans la masse du noyau.
Ces courants, auxquels on donne le nom de courants de Foucault, provoquent un échauffement, par effet Joule, du noyau de fer (Fig. 29-2b). La chaleur dégagée correspond à une perte de puissance proportionnelle au carré de la vitesse de rotation et au carré de la densité de flux.
Si le noyau magnétique de l'induit des machines à courant continu était fabriqué d'un seul bloc, la chaleur produite par les courants de Foucault serait tellement grande que le noyau serait porté au rouge en peu de temps, de sorte que ces machines seraient inutilisables.
Pour minimiser les pertes par courants de Foucault, on est conduit à feuilleter le noyau de l'induit. Le noyau est alors formé d'un empilage de tôles minces, isolées les unes des autres afin d'empêcher le passage du courant d'une tôle à l'autre. Les tôles sont disposées parallèlement au sens des lignes de force (Fig. 29-3).
Figure 29-3 a. Rotor formé d'un empilage de tôles; b. Les courants de Foucault dans chaque tôle sont beaucoup moins grands que dans un rotor plein

Les pertes sont atténuées davantage en augmentant la résistivité de la tôle par addition de 3 à 4 % de silicium. Avec des tôles au silicium de 0,35 mm d'épaisseur (Fig. 29-4), on peut limiter ces pertes à une petite fraction de la puissance de la machine.
Figure 29-4 Four électrique de 150 kW utilisé pour recuire les tôles magnétiques après le poinçonnage des encoches. Cette opération, effectuée à 800 °C dans une atmosphère contrôlée, réduit sensiblement les pertes massiques du fer. On voit ici les tôles sortant du four

Bien que le flux ne varie pas dans les pièces polaires des machines à courant continu, ces pièces sont généralement formées de tôles de fer doux car il est plus économique de tailler des tôles que d'usiner une grosse pièce d'acier pour lui donner la forme particulière des pièces polaires.
Comme les pertes dans le fer dépendent de plusieurs facteurs, les fabricants de tôles d'acier présentent généralement cette information sous forme de courbes.
Comme ordre de grandeur, pour une densité de 1,5 T et une fréquence de 60 Hz, les pertes totales dans la tôle de 0,35 mm (jauge n° 29), varient de 1,5 W/kg à 8 W/kg, selon la qualité de l'acier.
La Fig. 29-5 donne les pertes massiques en fonction de la densité de flux pour diverses tôles utilisées dans les induits. Ces pertes donnent la somme des pertes par hystérésis et par courants de Foucault pour une fréquence de 60 Hz.
Figure 29-5 Pertes massiques de diverses tôles utilisées dans les induits et les noyaux de transformateurs

On utilise l'acier au silicium M-36 sur des induits de puissance moyenne, tandis que le type M-14 est réservé aux grosses machines à haut rendement et aux transformateurs.
On note que pour une induction donnée, la tôle mince (0,35 mm) donne des pertes massiques sensiblement inférieures à celles d'une tôle plus épaisse (0,56 mm). Cette diminution est due uniquement à la réduction des pertes par courants de Foucault.
Courants de Foucault dans un noyau stationnaire
Nous avons vu que des pertes par courants de Foucault sont produites dans un noyau métallique lorsqu'il tourne dans un champ magnétique.
Des pertes semblables sont aussi produites lorsqu'un noyau stationnaire est traversé par un flux alternatif. La Fig. 29-6a montre une plaque métallique traversée par un flux alternatif.
Figure 29-6 Un flux alternatif traversant une plaque métallique induit dans celle-ci des tensions alternatives et des courants de Foucault

On peut considérer que la plaque est formée de plusieurs spires rectangulaires court-circuitées sur elles-mêmes.
Le flux alternatif induit une tension alternative dans chacune des «spires», produisant ainsi des courants de court-circuit alternatifs montrés à la Fig. 29-6b.
Ces courants de Foucault produisent dans la plaque métallique des pertes RI2 qui varient avec le carré de la fréquence et le carré de la densité de flux.
Or, la densité de flux circulant dans le noyau de fer d'un transformateur ou d'un moteur à courant alternatif est toujours importante, de sorte que si le noyau était plein, les courants de Foucault et les pertes résultantes seraient excessivement élevés (Fig. 29-7).
Figure 29-7 Des courants de Foucault intenses sont induits dans un noyau de fer plein

Afin de réduire les pertes, le noyau est constitué de lamelles d'acier très minces, isolées les unes des autres (Fig. 29-8).
Figure 29-8 Un noyau de fer composé de tôles minces diminue de beaucoup les pertes par courants de Foucault

Le flux dans chaque lamelle est alors très petit et comme sa résistance est beaucoup plus élevée que celle d'un noyau plein, les courants de Foucault, de même que les pertes totales, sont réduites à une fraction de leur valeur originale.
Pour une fréquence de 60 Hz, on utilise des tôles ayant généralement une épaisseur de 0,35 mm.
Variation des pertes avec la charge
Un moteur à c.c. tournant à vide ne développe évidemment aucune puissance utile. Il faut cependant lui fournir une certaine puissance si l'on veut qu'il continue à tourner.
Cette puissance est absorbée par le frottement mécanique, la ventilation, les pertes dans le fer et les pertes dans le cuivre de l'enroulement shunt.
Les pertes dans le cuivre de l'induit, de l'inducteur série et de l'enroulement de commutation sont minimes car le courant à vide est très faible par rapport au courant nominal.
Quand la machine est chargée (mécaniquement, si c'est un moteur, et électriquement, si c'est une génératrice), et dans les bobines de commutation.
Les pertes par effet Joule dans ces enroulements augmentent donc. Par contre, les pertes dans le fer et les pertes mécaniques demeurent sensiblement les mêmes qu'à vide, à moins que la vitesse ne change de façon appréciable.
De façon générale, les pertes dans une machine sort composées de pertes constantes et de pertes variables qui augmentent avec la charge.
Puisque ces pertes se transforment en chaleur, il en résulte une élévation de température. Cette élévation de température par rapport à la température ambiante est appelé échauffement.
Puissance et capacité de surcharge
L'échauffement d'une machine dépend des pertes et on sait que ces pertes augmentent avec la charge. Puisque l'échauffement doit être limité afin de ne pas détériorer les isolants, la charge doit aussi être limitée.
En somme, dans la majorité des cas, c'est l'élévation maximum de température des isolants qui détermine la puissance maximale qu'une machine peut débiter.
Lorsqu'une machine fournit une puissance dépassant sa puissance nominale, il y a échauffement excessif et par suite, détérioration partielle de la machine, ce qui réduit inévitablement le nombre d'années de service qu'on peut en attendre.
Lorsqu'une machine fonctionne de façon intermittente, elle peut supporter, sans risque d'échauffement excessif, une surcharge d'autant plus forte que son temps d'utilisation est plus court.
Ainsi, un moteur d'une puissance nominale de 10 kW peut facilement supporter une charge de 15 kW s'il ne fonctionne que quelques minutes par heure.
Toutefois, à des valeurs plus élevées, sa capacité de surcharge est limitée par d'autres facteurs, principalement électriques. Par exemple, il est impossible pour une machine de 10 kW de débiter une puissance de 100 kW.
Courbe de rendement
Le rendement d'une machine est le rapport entre la puissance utile P2 et la puissance Pi fournie à la machine (voir Notions de mécanique).
La puissance fournie est égale à la somme de la puissance utile et des pertes p.
On a alors:
(29-2)
Le rendement varie donc avec la puissance utile et les pertes; la relation entre le rendement et la puissance utile est généralement donnée par un graphique.
L' exercice numérique suivant indique la marche à suivre pour le calcul du rendement d'un moteur à courant continu.
Exemple 29-2
Un moteur compound à C.C. de 10 kW. 1150 r/min, 230V 50A a les pertes suivantes à pleine charte:
pertes par frottement sur les paliers 40 W
pertes par frottement des balais 50 W
pertes par ventilation = 200 W
pertes mécaniques totales 290 W (1)
pertes Joule dans le champ shunt = 120 W (2)
pertes dans le fer de l'induit = 420 W (3)
Total des pertes constantes = 830 W (4)
pertes Joule à pleine charge dans :
a) l'induit = 500 W
b)
le champ série 25 W
c) l'enroulement de commutation 70 W
Total des pertes variables 595 W (5)
a) Évaluer les pertes et le rendement à vide, ainsi qu'à 25%, 50%, 75%, 100$ et 150% de la charge nominale de la machine. (On négligera les pertes dues à la chute de tension entre les balais et la surface du collecteur.)
b) Tracer la courbe du rendement en fonction de la charge.
Solution
a) Fonctionnement à vide.
Les pertes à vide sont données par la somme des pertes mécaniques (1), des pertes dans le champ shunt (2) et des pertes dans le fer (3):
pertes à vide = 290 + 120 + 420 = 830 W
Ces pertes demeurent sensiblement constantes, même quand la charge varie.
À vide, les pertes Joule dans le circuit de l'induit sont négligeables. Le rendement est nul à vide, car aucune puissance utile n'est développée par le moteur.
Fonctionnement en charge
Lorsque le moteur est chargé à 25 % de sa puissance nominale, le courant qu'il tire est d'environ 25 % (ou 1/4) du courant nominal.
Puisque les pertes par effet Joule varient selon le carré du courant, les pertes dans le circuit de l'induit sont:
pertes variables = (1/4)² x 595 = 37 watts
Les pertes totales à 1/4 de la charge nominale sont :
p = 37 + 830 = 867 W
La puissance utile P2 développée par la machine à 25 % de la charge nominale, exprimée en watts, est:
P2 = 10 kW x 0,25 = 2500 W
La puissance P1 absorbée par le moteur est donnée par la somme de la puissance utile et des pertes :
P1 = P2 +p = 2500 + 867 = 3367 W
Le rendement est alors:

On trouvera de la même façon les pertes à 50 %, 75 %, 100 % et 150 % de la charge nominale :
A 50 %:
p = (1/2)² x 595
+ 830 = 979 W
À 75 %:
p = (3/4)² x 595 + 830 = 1165 W
À 100
%:
p = 595 + 830 = 1425 W
À 150 %:
p = (1,5)² x 595 + 830 =
2169 W
b) Les calculs du rendement à différentes valeurs de charge sont résumés dans le tableau 29-1.

Les résultats sont représentés graphiquement à la Fig. 29-9.
Figure 29-9 Rendement et pertes en fonction de la puissance mécanique développée

Il est bon de retenir que le rendement d'un moteur est faible aux faibles charges.
On aura donc intérêt à choisir la capacité d'un moteur destiné à entraîner une charge de valeur déterminée, de façon que la puissance nominale de ce moteur soit à peu près égale à la puissance exigée par la charge.
Normes d'échauffement
On a déjà vu à la section que les isolants sont groupés en différentes classes correspondant à la température maximale qu'ils peuvent supporter.
Ainsi, un isolant de classe 130 °C aura une durée de vie raisonnable (environ 20 000 h) si sa température n'excède pas 130 °C.
Les organismes de normalisation établissent également une température ambiante maximale dont la valeur est habituellement de 40 °C.
Cette température normalisée est établie pour les raisons suivantes :
1. elle permet aux fabricants de machines électriques de prévoir les pires conditions de température ambiante auxquelles leurs machines peuvent être soumises et, par conséquent,
2. elle permet aux mêmes fabricants de normaliser la grosseur des machines et de donner des performances garanties.
On peut mieux apprécier l'impact de cette norme quand on réalise que toutes les machines et tous les appareils électriques isolés classe 105 °C sont environ 15 % plus petits, donc moins coûteux lorsqu'on spécifie une température ambiante normalisée de 30 °C au lieu de 40 °C.
La Fig. 29-10 montre les limites de température des différentes classes d'isolants (courbe 1) et la température ambiante normalisée (courbe 3).
Figure 29-10 Normes de température utilisées pour certains moteurs à courant alternatif (tirées des publications CSA C22.2, n°S 0, 11, 54). Voir aussi le chapitre 9, tableau 9-2

Pour chaque classe, la
différence de température entre ces deux courbes donne l'échauffement normalisé
(«hot-spot temperature rise»); c'est elle qui permet au fabricant d'établir
la grosseur de son moteur, de son relais, etc.
Par exemple, supposons que l'on désire déterminer l'échauffement d'un moteur de 100 kW, isolation classe 130 °C. Lors des essais, on devra lui appliquer une charge de 100 kW et déterminer l'endroit le plus chaud («hot-spot») à l'intérieur de la machine.
Ce point le plus chaud est probablement situé en plein milieu d'une encoche, à l'intérieur même d'une bobine, soit à un endroit tout à fait inaccessible.
Comment atteindre cet endroit critique?
Le fabricant peut implanter des petits détecteurs de température (thermocouples ou thermistors) à l'intérieur des bobines, permettant de déterminer la température crête lorsque la machine est en marche.
Cependant, cette méthode directe de mesure de la température du point le plus chaud «hot-spot» est coûteuse et elle n'est justifiable que pour les machines de grande capacité.
C'est pourquoi les bureaux de normalisation comme le CSA (Association canadienne de normalisation) permettent l'utilisation d'une deuxième méthode pour mesurer la température.
Comme nous allons l'expliquer, elle consiste à mesurer l'augmentation de résistance d'un enroulement, et à en déduire la température. Cette température représente la température moyenne de l'enroulement. Elle est évidemment plus basse que celle que donnerait un détecteur implanté.
Il a donc fallu définir une autre norme : on suppose que l'écart entre la température maximale réelle et la température déterminée par la méthode de l'augmentation de résistance est, soit 5 °C, soit 10 °C, soit 15 °C
Habituellement, l'écart dépend de la classe d'isolant. La courbe 2 donne la température maximale permise des enroulements d'un moteur à courant alternatif lorsqu'on utilise la méthode de l'augmentation de résistance.
On constate que l'écart entre cette courbe et la courbe 1 est de:
5 °C pour l'isolation classe 105 °C,
10 °C pour les classes 130 °C et 155 °C,
15 °C pour la classe 180 °C.
Il s'ensuit que l'échauffement permis lorsqu'on utilise la méthode de l'augmentation de résistance est de :
60 °C pour l'isolation classe 105 °C,
80 °C pour la classe 130 °C,
105 °C pour la classe 155 °C et
125 °C pour la classe 180 °C.
Les normes CSA supposent que l'échauffement à pleine charge sera le même pour toute température ambiante comprise entre 10 °C et 40 °C.
Ceci permet au manufacturiers de vérifier l'échauffement de leurs moteurs dans des températures ambiantes plus confortables que 40 °C.
Il est intéressant de remarquer que pour les moteurs à courant alternatif ayant une puissance inférieure à 750 W, on a établi une température ambiante normalisée de 30 °C (courbe 4).
La plupart de ces moteurs sont installés dans des résidences où la température n'atteint pas les valeurs élevées que l'on rencontre dans certaines industries. Le choix de 30 °C au lieu de 40 °C implique des échauffements de 10 °C plus élevés, soit 70 °C pour la classe 105 °C.
Cela permet d'augmenter la puissance que l'on peut tirer de ces moteurs.
Les normes d'échauffement dépendent non seulement de la classe d'isolant utilisée mais également du genre d'appareil (moteur, transformateur, relais, etc.), de sa construction (abrité, blindé, etc) et de son application (commerciale, industrielle, navale, etc).
Il est donc important de consulter les normes avant de faire un essai d'échauffement sur une machine.
Mesure de l'échauffement
On peut déterminer l'échauffement d'une machine par la méthode de l'augmentation de résistance. Cette méthode consiste à mesurer la résistance d'un enroulement à froid à une température connue, et de nouveau lorsque l'enroulement est chaud.
Si le bobinage est en cuivre, la température à chaud est donnée par la formule:
(29-3)
(29-4)
où
t2 =
température de l'enroulement à chaud [°C]
R2 = résistance de l'enroulement à chaud [Ω]
R1 = résistance de l'enroulement à froid [Ω]
t1 = température de l'enroulement à froid [°C]
234 = constante égale à 1/a = 1/0,00427
θ = échauffement de l'enroulement [°C]
ta = température ambiante lorsque l'enroulement est chaud [°C]
Exemple 29-3
L'inducteur shunt d'un moteur de 500 kW, 300 V, arrêté depuis quelques jours. possède une résistance de 44,6Ω.
La température ambiante est alors de 23 °C.
Lorsque la machine est en marche, à une température ambiante (le 28 °C, la résistance (le l' inducteur est de 59,5Ω.
Calculer:
a) la température de l'enroulement
b) l'échauffement (le l'inducteur shunt
Solution
a) En appliquant la formule (29-3) on trouve :

b) L'échauffement est donc:

On peut aussi mesurer l'échauffement au moyen d'un thermomètre. Cependant, la température varie beaucoup à différents points de la même machine; si l'on emploie un thermomètre pour déterminer l'échauffement, il est important de le placer sur la partie accessible la plus chaude.
Suivant les calculs ou les préférences du constructeur, le point le plus chaud peut se trouver dans l'induit ou dans l'inducteur.
Étant donné que la température est plus élevée à l'intérieur même des enroulements, un thermomètre ne peut jamais atteindre le point le plus chaud. Cette méthode de mesure de l'échauffement n'a donc qu'une valeur comparative.
Pour la plupart des machines possédant un système d'isolation classe 105 °C, l'échauffement admissible mesuré par la méthode du thermomètre est de 40 °C.
Exemple 29-4
La plaque signalétique d'un moteur indique un échauffement (« temperature risc») de 40 °C.
Au moyen d'un thermomètre, on trouve que la température de la partie la plus chaude de la machine est de 67 °C. la machine fonctionnant à pleine charge. La température de l'air environnant est alors de 30 °C.
Déterminer si la machine surchauffe.
Solution
L'échauffement est de 67° - 30° = 37 °C, alors que l'échauffement permis est de 40 °C. La machine n'est donc pas trop chaude.
Certaines machines sont isolées au mica, au verre ou avec d'autres isolants minéraux qui peuvent supporter des températures beaucoup plus élevées que les isolants organiques des machines ordinaires. On admet alors une limite d'échauffement, mesuré par thermomètre, supérieure aux valeurs conventionnelles de 40° ou 55 °C.
FACTEURS AFFECTANT LA GROSSEUR ET LE RENDEMENT DES MACHINES ÉLECTRIQUES