Le Grand HéronTraits distinctifsLe Grand Héron Ardea herodius, le plus grand de nos hérons, est celui dont l'aire de répartition est la plus étendue au Canada. Pendant la période de nidification et de post-nidification, il s'aventure vers le nord jusqu'à Terre-Neuve et jusqu'au détroit du Prince-William, en Alaska, et vers le sud, jusqu'au Mexique et aux Antilles. En hiver, il quitte la plupart des régions du Canada, sauf la côte de la Colombie-Britannique où il réside à l'année longue (voir la carte), et hiverne aux États-Unis, au Panama, en Colombie ou au Venezuela. Posés au sol, les adultes mesurent plus d'un mètre de hauteur. Ils ont la tête blanche, et, de chaque côté, une bande noire s'étend depuis les yeux jaunes et se prolonge vers l'arrière où elle se transforme en plumes noires effilées. La coloration du dos est bleu grisâtre tandis que le ventre est blanchâtre zébré de noir. En vol, les hérons ont le cou replié et la tête appuyée contre les épaules (voir l'illustration). Jusqu'à l'âge de un an, ils ont une huppe grise et des ailes grises striées de brun. Régime alimentaireLe Grand Héron se nourrit principalement de petits poissons qui mesurent moins de 65 mm ou dont la taille équivaut à moins de la moitié de la longueur de son bec. À l'occasion, il se laisse aussi tenter par les crustacés, les insectes, les rongeurs, les amphibiens (surtout les grenouilles), les reptiles et les petits oiseaux. Pour pêcher, le Grand Héron emploie deux techniques principales. La première consiste à rester immobile, le cou tendu faisant un angle d'environ 45 degrés avec la surface de l'eau. Seuls la tête et les yeux bougent pour repérer la proie. Si, après quelques minutes, aucun poisson n'est venu à sa portée, le héron se déplace lentement et reprend sa position un peu plus loin. Par contre, si une proie s'aventure assez près, il replie son cou avec lenteur et avance lentement une patte dans sa direction. Soudain, tout le corps se détend, et la tête plonge vers la proie, qui est capturée par le bec et avalée, hors de l'eau, dans un mouvement adroit de la tête, qui la fait tomber, la tête la première, dans le gosier. La deuxième technique consiste à patauger doucement dans quelque 15 à 25 cm d'eau jusqu'àce qu'un poisson soit délogé de sa cachette. Le héron s'immobilise et allonge lentement le cou. Lorsque la proie se trouve à sa portée, il détend tout son corps et plonge la tête pour attraper le poisson. La proie avalée, le héron reprend sa marche. S'il ne trouve pas suffisamment de poissons dans un secteur, il s'envole et recommence à pêcher un peu plus loin. Lorsque la proie est trop grosse pour être avalée d'un trait ou qu'elle est pourvue d'épines dangereuses, le héron la laisse tomber à l'eau et la saisit violemment avec son bec autant de fois qu'il le faut pour l'étourdir ou casser les épines, de manière à pouvoir l'avaler sans problème. Parfois, deux proies peuvent être capturées simultanément. Il existe aussi d'autres techniques, plus rarement observées. Ainsi, il arrive parfois que des Grands Hérons en vol plongent sous l'eau pour capturer des poissons. D'autres planent au-dessus de l'eau et plongent la tête pour attraper des proies. Enfin, certains nagent en eau profonde et se nourrissent de poissons qui se tiennent près de la surface. NidificationLes Grands Hérons nichent habituellement en colonies, dans des boisés situés à moins de quelques kilomètres de leur principale aire d'alimentation et peu accessibles aux humains et aux prédateurs terrestres. Les nids récemment construits ressemblent à des plates-formes délicates faites de branches sèches entrelacées, tandis que les vieux nids sont des structures massives de taille variable. Habituellement, le diamètre des nids est d'environ un mètre avec, au centre, une dépression d'environ 15 cm de rayon et 10 cm de profondeur. Cette cavité intérieure est parfois tapissée de brindilles, de mousses, de lichens ou d'aiguilles de conifères. Les Grands Hérons nichent habituellement près du sommet des arbres. Dans les colonies composées de plusieurs espèces, ils s'approprient le haut de la cime des arbres, tandis que les Bihoreaux à couronne noire et les Cormorans à aigrettes en occupent la base. Au printemps, les mâles et les femelles arrivent à peu près en même temps sur les sites de nidification. Les mâles choisissent habituellement un endroit où se trouvent déjà de vieux nids. Chacun des mâles défend alors un territoire dans l'arbre où il compte construire un nouveau nid ou restaurer un nid existant. De là, ils paradent et poussent des cris stridents à l'approche des femelles. De nouveaux couples sont formés chaque année. Peu après leur arrivée, les oiseaux âgés de deux ans et plus s'accouplent ordinairement dans le nid ou, à défaut, sur une branche voisine. Le nid est construit peu de temps après. Le mâle ramasse les matériaux à proximité du site de nidification, dans des arbres morts ou vivants, dans les nids voisins ou sur le sol, et les apporte à la femelle, qui en tapisse le nid. Ordinairement, un couple prend moins de une semaine à construire un nid assez solide pour permettre la ponte et l'incubation. La construction se poursuit pendant presque toute la période de nidification. Les ramilles sont surtout ajoutées au moment de la ponte ou de l'éclosion des oeufs. Au Canada, la femelle pond généralement de trois à cinq oeufs en avril. L'incubation, assurée par les deux partenaires, commence dès la ponte du premier oeuf et dure environ 28 jours. Le mâle couve les oeufs le jour, et la femelle, la nuit. Habituellement les oeufs éclosent au cours de la période où la nourriture est particulièrement abondante dans le secteur. Aussitôt, les parents commencent à ravitailler les jeunes, ne les couvant que la première semaine. Toutefois, la présence d'un adulte au nid est presque continuelle pendant deux autres semaines. Le mâle reste au nid le jour pendant que la femelle ravitaille la famille. Les rôles sont inversés la nuit. Après le premier mois, le couple passe la majeure partie de son temps hors de la colonie, n'y revenant que pour nourrir les jeunes et assurer parfois le guet pendant une courte période. Lorsqu'un adulte arrive à la héronnière, il émet habituellement un cri guttural et sourd. Les jeunes crient sans arrêt et se prennent mutuellement le bec. Il est rare que l'adulte aille les retrouver directement. Il va plutôt se poser à quelques mètres du nid. Ce n'est qu'après cinq minutes environ qu'il se rend au nid et régurgite la nourriture prédigérée. Les héronneaux les plus vieux et les plus forts s'approprient la plus grosse part en agrippant le bec de l'adulte et en attrapant la nourriture. Si la nourriture n'est pas assez abondante pour satisfaire l'appétit grandissant de la nichée, seuls les jeunes les plus vigoureux survivent. Les héronneaux chétifs s'affaiblissent progressivement si bien qu'ils finissent par tomber du nid, bousculés par leurs compagnons avides d'espace pour s'étirer les ailes. Au sol, ils sont condamnés à mourir de faim, car les adultes ne les nourrissent pas. Les héronneaux se développent rapidement. À l'âge de deux semaines, entre les périodes de sommeil, ils nettoient leur plumage et se tiennent souvent debout, les ailes à demi-ouvertes, tout en faisant vibrer la membrane élastique de leur gorge pour se rafraîchir. Dès l'âge de six semaines, ils ne dorment presque plus durant l'absence des parents, s'entraînant plutôt en vue de leur premier vol. Ils marchent sur les branches qui entourent le nid, sautent en battant des ailes ou s'agrippent à une branche avec leurs griffes et tentent de la soulever avec la force de leurs battements d'ailes. À l'âge de huit semaines, les jeunes volent maladroitement d'un arbre à l'autre, mais retournent toujours au nid pour se faire nourrir. À partir de ce moment, il arrive souvent qu'un jeune se rende dans un nid qui n'est pas le sien, ce qui occasionne des combats entre les héronneaux présents et l'intrus. Très souvent, ce dernier est plus développé que les autres héronneaux et parvient à demeurer dans le nid, parfois après avoir délogé un des occupants en le poussant en bas du nid. Ce n'est que lorsqu'un adulte revient au nid que l'intrus est chassé. Vers la dixième semaine, les jeunes sont complètement indépendants et prennent leur envol définitif. Comportement socialLes Grands Hérons sont des oiseaux sociables qui se rassemblent parfois sur les sites d'alimentation et se reproduisent en colonies. Lorsque la nourriture est distribuée inégalement dans un milieu et que sa présence à un endroit est éphémère (tel un banc de poissons), l'oiseau solitaire prendra beaucoup plus de temps à la trouver que celui qui fait partie d'un groupe et qui peut se diriger à l'endroit voulu dès qu'un membre de sa bande repère de la nourriture. Toutefois, les scientifiques ne connaissent pas encore avec certitude les raisons qui poussent les hérons à nicher en colonies. Les Grands Hérons se regroupent aussi afin de mieux se protéger des prédateurs. Le vol soudain et désordonné d'un grand nombre d'oiseaux peut surprendre le prédateur, qui, ainsi distrait, compromet d'autant ses chances de capture. Mortalité et conservationLe Grand Héron peut vivre jusqu'à 17 ans. Parvenu à l'âge adulte, il n'a que très peu d'ennemis naturels. Il arrive parfois que des rapaces l'attaquent, mais ces prédateurs ne constituent pas un élément important de limitation des populations. L'assèchement des marais et la destruction d'autres retraites favorites du héron sont les principaux dangers qui le menacent. Le nombre de hérons qui nichent dans une région dépend directement des aires d'alimentation disponibles. Pour les individus de cette espèce, la mortalité est très forte au tout début de leur existence; les oeufs et les héronneaux sont la proie des corneilles, des corbeaux, des goélands, des rapaces et des ratons laveurs. Les fortes pluies et le froid, au moment de l'éclosion, sont également très dévastateurs. La maladie ne constitue normalement pas une cause majeure de mortalité. Toutefois, lorsque la nourriture est rare, les jeunes les plus chétifs en sont souvent privés et dépérissent. On soupçonne aussi les pesticides d'inhiber la reproduction et de provoquer des décès, quoique les données obtenues jusqu'à présent suggèrent que les populations de Grands Hérons n'en ont pas beaucoup souffert dans l'ensemble. Pendant la nidification, les hérons sont particulièrement sensibles aux perturbations. Les scientifiques recommandent généralement d'éviter toute construction à moins de 300 m d'une colonie de hérons et toute perturbation entre les mois de mars et d'août. Ouvrages à consulter
Publié en vertu de l'autorisation du ministre de l'Environnement |