L'ours noir

Ours noir

L'ours noir Ursus americanus, désigné aussi sous le nom de baribal en France, est, de nos jours, l'un des animaux sauvages les plus connus en Amérique du Nord. Pour le campeur, il est à la fois une source d'ennuis et un élément fascinant de la vie en plein air. La plupart des touristes sont fort déçus s'ils n'ont pas la chance d'entrevoir un ours pendant leur séjour dans les parcs provinciaux ou nationaux du Canada.

Comment distinguer un ours noir d'un grizzli

ours noir

grizzli

L'ours noir appartient à la famille des ursidés, dont on trouve des représentants dans presque tout l'hémisphère boréal et dans le nord de l'Amérique du Sud. En Amérique du Nord, les autres membres de cette famille sont l'ours brun (grizzli) et l'ours blanc (polaire), qui sont tous deux beaucoup plus gros que l'ours noir.

Sur le continent nord-américain, l'ours noir occupe un vaste territoire allant d'est en ouest, jusqu'en Alaska au nord, et jusqu'au Mexique au sud. Il est absent de l'Île-du-Prince-Édouard, du nord de l'Alberta et de la Saskatchewan ainsi que de l'extrême nord de l'Ontario. Son aire de répartition est figurée sur la carte.

Bien qu'il fréquente divers habitats, l'ours noir préfère les forêts denses et les broussailles touffues. Mais c'est probablement dans les forêts mixtes de conifères et de feuillus qu'il vit en plus grand nombre. Dans les habitats qui lui sont favorables, on dénombre un ours par 3 ou 4 km2. Il est difficile d'évaluer la population, car l'ours noir est un animal timide et discret. Selon les estimations récentes, la population continentale compterait 500 000 bêtes, à quelque 200 000 individus près!

Aire de répartition de l'ours noir

Caractéristiques physiques

L'ours noir est un mammifère trapu et massif. À l'âge adulte, il mesure quelque 150 cm de longueur et de 100 à 120 cm de hauteur au garrot. Il possède une tête de grosseur moyenne, un profil facial presque droit, un museau pointu, des naseaux allongés et une langue d'une grande agilité. Ses lèvres, contrairement à celles d'autres bêtes sauvages, comme le loup ou le lynx roux, se retroussent sur les gencives et sont très mobiles, ce qui lui permet de happer de minuscules baies ou même des fourmis. Ses yeux sont petits et ses oreilles arrondies. Sa queue est très courte et à peine visible, et ses pieds sont couverts d'une épaisse fourrure. À l'instar de l'être humain, l'ours est plantigrade, c'est-à-dire qu'il marche sur la plante des pieds. Les pattes sont garnies de cinq doigts armés de griffes puissantes, recourbées et non rétractiles, dont il se sert pour creuser et arracher les racines, les souches et les troncs d'arbres lorsqu'il est en quête de nourriture.

En raison de sa silhouette trapue, l'ours noir paraît beaucoup plus lourd qu'il ne l'est en réalité. Les mâles adultes pèsent généralement 135 kg, mais des spécimens de plus de 290 kg ont été signalés. La femelle est beaucoup plus petite que le mâle et pèse en moyenne 70 kg.

En règle générale, l'ours noir a un pelage noir et un museau brunâtre; une tache blanche orne souvent sa poitrine ou la partie inférieure de sa gorge. Même si la couleur noire est la plus répandue, certains ont le pelage brun, brun foncé, cannelle, bleu-noir ou même blanc. Les albinos sont rares. Les ours au pelage clair sont plus nombreux dans l'Ouest et dans les montagnes que dans l'Est. Ces différentes teintes peuvent se rencontrer chez les oursons d'une même portée mais, habituellement, les petits sont tous de la même couleur que leur mère.

Affligé d'une vue assez faible, l'ours noir possède toutefois une ouïe et un odorat remarquables. L'animal en alerte cherche habituellement à se placer sous le vent par rapport à l'intrus et ce, pour mieux l'identifier à l'odeur. Dans des conditions atmosphériques favorables, il peut repérer de loin, grâce à l'odeur qui s'en dégage, la charogne dont il est friand. Il arrive souvent que l'ours noir se tienne sur ses pattes arrière et renifle le vent en quête d'odeurs délectables.

L'ours noir se déplace d'un pas lourd et lent, mais il peut accélérer considérablement son allure au besoin. Sur de courtes distances, il peut atteindre une vitesse de 55 km/h. Habile nageur, il traverse souvent des cours d'eau et des petits lacs.

L'ours noir est aussi un excellent grimpeur. Lorsqu'ils sont apeurés, les jeunes courent vers l'arbre le plus proche. Ils l'escaladent par petits bonds rapides, enserrant le tronc de leurs pattes de devant et poussant avec celles de derrière. Ils descendent à reculons et se laissent souvent choir sur le sol d'une hauteur de 4,5 m. Ils disparaissent ensuite dans les broussailles, apparemment peu ébranlés par leur descente précipitée.

Bien qu'on l'entende rarement, l'ours noir émet plusieurs cris distincts : grognements hargneux, plaintes et reniflements divers. La mère avertit ses oursons d'un danger par un " jappement " bruyant suivi d'une plainte ou d'un geignement. Lorsqu'ils sont apeurés, les petits " pleurent " un peu à la façon d'un bébé.

Mode de vie

L'ours noir mène une vie essentiellement solitaire, mais un lien étroit unit la femelle à ses petits. Le mâle rompt provisoirement sa solitude à l'époque du rut lorsqu'il cherche à s'accoupler. L'accouplement a lieu en juin ou au début de juillet; la femelle met bas au mois de janvier ou de février suivant, pendant la période d'hivernage.

En règle générale, la portée compte deux petits, parfois un seul, parfois jusqu'à quatre. À la naissance, les oursons mesurent de 15 à 20 cm de long et pèsent un peu plus de 225 g. Comparativement aux autres mammifères, le rapport entre le poids des nouveau-nés et celui de la mère est très faible. Par exemple, une femme de 70 kg peut s'attendre à ce que son nouveau-né pèse environ 3 kg, soit 12 fois la masse d'un ourson à la naissance! Les petits se développent rapidement et sont très actifs au moment où ils quittent la tanière, accompagnés de leur mère, au printemps. À l'âge d'un an, ils pèsent de 13 à 27 kg et à peine plus à deux ans. Normalement, ils restent avec leur mère jusqu'à l'âge de 16 ou 17 mois. On estime à environ 30 % les chances de survie des oursons qui perdent leur mère dès le premier été comparativement à quelque 80 % pour ceux qui n'ont pas à subir cette épreuve.

Empreintes d'ours telles qu'elles
apparaissent sur la piste

Patte arrière

En captivité, le mâle et la femelle peuvent parvenir à la maturité sexuelle vers l'âge de trois ou quatre ans; dans leur milieu naturel toutefois, cette maturité est plus tardive. Alors que le mâle continue de croître jusqu'à l'âge de sept ans, la femelle cesse de se développer un peu plus tôt. L'ours noir peut vivre jusqu'à 25 ou 30 ans, mais la plupart des ours vivent moins de 10 ans dans la nature.

À l'automne, lorsque les jours raccourcissent et que le temps se refroidit, l'animal se met en quête d'une tanière pour hiverner. (Note du rédacteur : Le terme " hiverner " signifie se mettre à l'abri pour l'hiver; noter la distinction de sens d'avec le terme " hiberner ", au sens propre : passer l'hiver dans un état d'engourdissement, utilisé un peu plus bas.) Il choisit ordinairement une vieille souche d'arbre, un tronc renversé ou une grotte à flanc de colline. La plupart du temps, cette tanière est juste assez grande pour qu'il puisse s'y blottir. Contrairement au mâle, la femelle tapisse généralement le sol avec des herbes, des fougères et des feuilles. Habituellement, elle commence à hiverner plus tôt que le mâle, qui attend souvent les premières chutes de neige avant de gagner sa tanière.

Des études récentes de la physiologie de l'ours noir ont révélé que celui-ci, une fois retiré dans sa tanière, présente toutefois à certains égards le comportement typique d'un véritable hibernant. En effet, si la température corporelle ne s'abaisse que légèrement, le rythme cardiaque, lui, ralentit considérablement. En outre, contrairement à de nombreux petits mammifères hibernants, l'ours noir n'éprouve pas le besoin de se nourrir ou de déféquer, mais survit grâce à ses seules réserves de graisse. Cependant ce ne sont pas de véritables hibernants, car on peut les réveiller si on les dérange suffisamment. Lorsque le temps devient exceptionnellement doux en hiver, certains peuvent même quitter leur tanière pendant de courtes périodes.

Avec l'arrivée du printemps et des beaux jours, l'ours sort de sa tanière et se met en quête de nourriture. Durant l'hiver, il peut avoir perdu jusqu'à 30 % de son poids normal. Pour la plupart, la cure d'amaigrissement forcé se poursuit durant les premiers mois de l'été jusqu'à l'apparition des baies à la mi-juillet.

Déplacements et nourriture

Les ours noirs peuvent parcourir de grandes distances. Les biologistes qui en capturent pour les remettre en liberté 80 km plus loin ont parfois la surprise de retrouver plus tard ces mêmes animaux dans leur domaine vital originel. Cependant, la femelle occupe habituellement un domaine vital assez restreint. Le domaine du mâle adulte couvre celui de plusieurs femelles. Comme la majorité des animaux sauvages, l'ours noir choisit une piste qu'il emprunte ensuite régulièrement pour se déplacer d'un endroit à l'autre. Les chasseurs d'autrefois le savaient, car ils tendaient souvent leurs pièges en travers de ces pistes bien battues.

L'activité de l'ours noir varie d'une région à l'autre en fonction d'un certain nombre de facteurs, dont les activités humaines. Ainsi, dans les régions plus reculées, il s'affaire habituellement de l'aube jusqu'au crépuscule, tandis que dans les secteurs plus touchés par les activités humaines, il circule surtout la nuit afin d'éviter tout contact avec l'être humain. Bien sûr, certains individus recherchent la présence des humains dans l'espoir de décrocher un repas gratuit.

L'ours noir est omnivore et se nourrit d'à peu près tout ce qui lui tombe sous la dent. Les plantes forment l'essentiel de son régime alimentaire, surtout à la fin de l'été et à l'automne où abondent les baies et les noix. Ses fruits favoris sont les bleuets, les fraises, les baies de shépherdie, d'amélanchier et de sureau, les cerises noires et les pommes. Il affectionne aussi les glands, les noisettes et les faînes. Il se régale également de certains insectes, comme les fourmis et les sauterelles, et il lui arrive de retourner des troncs d'arbres, de vieilles souches et des pierres pour en trouver. Il consomme aussi des poissons, de petits mammifères et, parfois, des oiseaux. Au printemps, certains ours s'attaquent aux faons des orignaux, des cerfs, des wapitis et des caribous. Son goût pour la charogne s'accroît en proportion du degré de décomposition de la carcasse. Un arbre contenant du miel constitue bien entendu un vrai régal.  Enfin, comme l'ours noir boit beaucoup, il se tient habituellement à proximité d'une étendue d'eau.

Causes de mortalité

La longévité de l'ours noir peut varier de 20 à 25 ans, mais peu d'ours vivent aussi longtemps dans leur milieu naturel. Dans les régions où l'ours est chassé, la chasse autorisée constitue l'une des causes majeures de mortalité chez l'espèce, notamment chez les ours âgés de deux ans ou plus. Les mâles sont habituellement tués avant les femelles, car ils sont plus audacieux et se déplacent sur de plus grandes distances. Les femelles deviennent plus vulnérables si la chasse s'intensifie. Les jeunes ours des populations chassées et non chassées meurent de faim, des suites d'accidents ou de prédation. Leurs prédateurs sont les ours adultes et parfois les loups et les lynx.

Récemment, la demande accrue de vésicules biliaires, de pattes et d'autres parties de l'ours, réputées avoir des propriétés médicinales et aphrodisiaques, a fait naître des craintes quant à la chasse illégale à l'ours. Dans certaines parties du globe, une vésicule déshydratée peut valoir jusqu'à 50 000 $.

Certains ours noirs sont les hôtes de parasites comme le ténia et l'ascaride, qui semblent toutefois avoir peu d'effets sur la santé de ces animaux. En général, les ours noirs sauvages sont très peu parasités. Du point de vue de l'hygiène publique, la trichinose, qui est causée par la trichine, un ver nématode filiforme, est probablement la maladie parasitaire la plus importante chez l'ours. Puisque l'être humain y est vulnérable, il importe de bien cuire la viande d'ours avant de la consommer.

Les ours et l'art du graffiti

On estime que les griffures et autres marques faites par les ours sur les
arbres leur servent de moyen de communication. Les mâles adultes
sont ceux qui ont davantage recours à ce type de language, présumément
pour signaler leur présence à des partenaires ou à des rivaux
potentiels. C'est à la fin du printemps et au début de l'été (de la
mi-juin à la mi-juillet) au moment de la saison des amours que ces marques
sont les plus nombreuses.

Rapports avec l'être humain


L'attitude de l'être humain envers l'ours a toujours été marquée de prudence et de respect, voire de vénération dans les temps anciens. De nos jours, de nombreux Amérindiens vénèrent encore cet animal et témoignent d'une très grande admiration pour le chasseur qui a réussi à en abattre un.

Aux premiers temps de la colonisation européenne, les chasseurs d'ours gagnaient leur vie en chassant et en piégeant les ours, les loups et les couguars à cause d'un danger présumé pour le bétail et peut-être pour les colons. En réalité, la plupart des ours noirs s'attaquent rarement à d'autres grands mammifères et ne peuvent être considérés comme des prédateurs au même titre que les loups, les belettes ou les ours blancs. De nos jours, ils sont recherchés comme gibier en raison de leur grande taille et de leur nature farouche et parce qu'ils représentent un véritable défi pour les chasseurs. Apprêtée avec soin, leur viande constitue aussi un mets de choix pour bon nombre d'amateurs de viande de gibier.

Au Canada et en Alaska, il existe actuellement deux saisons de chasse légale à l'ours noir, soit au printemps et à l'automne; toutefois, en raison de la surexploitation de l'espèce, il est interdit de chasser l'ours noir au printemps dans la plupart des 48 États américains du sud.

Les ours noirs raffolent des ordures ménagères et se rassemblent souvent dans les décharges. C'est ainsi qu'ils s'approchent parfois des humains qui prennent plaisir à surveiller le manège de ces animaux en train de manger, surtout celui des oursons.  Ils sont, bien sûr, moins amusants lorsqu'ils s'attaquent au repas des pique-niqueurs.

La plupart des ours noirs étant très timides et discrets, ils évitent habituellement de s'approcher des êtres humains. On sait toutefois qu'ils peuvent s'attaquer aux humains, mais de tels incidents sont très rares. Les auteurs de ces attaques sont généralement des ours qui se sont nourris dans les poubelles ou qui sont en très mauvaise condition physique en raison de leur âge ou à la suite d'une maladie ou de blessures.

Il arrive parfois que les ours s'en prennent au bétail ou aux ruches des apiculteurs. Ordinairement, c'est le fait d'une ou deux bêtes dont il suffit de se débarrasser pour éliminer le problème. Lorsqu'on aperçoit des ours dans leur milieu naturel, il faut se rappeler que ce sont des animaux sauvages qu'il faut traiter avec prudence. Il faut s'abstenir de les nourrir. Habituellement, l'animal bat promptement en retraite lorsqu'on s'en approche, mais il faut éviter les risques inutiles, car l'ours, tout comme l'être humain, peut être imprévisible. Même s'il est un sujet d'observation et de photographie très intéressant, il vaut mieux le tenir à distance.

En 1992, pour limiter la chasse illégale de l'ours noir et le commerce international illicite des vésicules biliaires d'ours sauvages (y compris les ours asiatiques en danger de disparition), les 115 pays (dont le Canada) signataires de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES) ont convenu d'inclure l'ours noir dans la liste de l'Annexe II de la Convention. Depuis, tout chasseur qui désire transiter une partie quelconque d'un ours noir par un pays membre de la CITES doit obtenir une licence d'exportation de la CITES du pays d'où provient l'ours.

Ouvrages à consulter

  • Banfield, A.W.F. 1977. Les mammifères du Canada. 2e éd. Presses de l'Université Laval et University of Toronto Press. Pp. 283-286.
  • Delaunois, A. 1991. Les mammifères de chez nous. Éditions Héritage Inc. Saint-Lambert (Qué.). Pp. 143-146.
  • Dubois, P. 1992. L'ours noir. Une vieille connaissance encore mal connue. Dans Forêt Conservation. Magazine de l'AFQ et des clubs 4-H du Québec. Québec (Qué.). (59)6:24-27.
Publié en vertu de l'autorisation du Ministre de l'Environnement
(c) Ministre des Approvisionnements et Services Canada, 1968, 1970, 1973, 1984, 1993
N° de catalogue CW69-4/8-1993F
ISBN 0-662-98179-0
Texte : George Kolenosky
Révisé par George Kolenosky, en 1992
Photos : Robert McCaw

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